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Il s’en va la queue entre les jambes

Togo - Opinions
Tchakie Thomas Sékpona-M., Ph.D.
«Faute d’esprit, la majorité des rois et des gouvernants imite les statuaires sans art, ceux qui estiment que les colosses apparaissent grands et corpulents s’ils les façonnent avec les jambes bien écartées, les bras tendus et la bouche ouverte. Ceux-là croient en effet que par la profondeur de la voix , la dureté du regard, la sévérité des manières et l’intransigeance du caractère, on représente l’ampleur et la majesté du commandement, mais ils ne diffèrent en rien de ces statues colossales qui ont à l’extérieur la forme d’un héros et d’un dieu mais qui à l’intérieur sont pleines de terre, de pierres et de plomb; sauf que ces poids permettent au moins à la stature droite de ces statues de se maintenir immobile, alors que ces stratèges et ces dirigeants sans éducation sont souvent ébranlés et renversés par leur manque de jugement à l’intérieur, puisque, élevant leur autorité dans les hauteurs sur une base qui ne tient pas droit, ils chancellent avec elle.» (Plutarque)

Lorsque les loups se battent, le vaincu ou celui qui s’avoue vaincu se couche sur le dos les pattes en l’air ou il fuit à toutes jambes la queue rentrée ou baissée. C’est un signe que le vainqueur reconnaît très vite et laisse le perdant s’en aller confus et honteux. D’où l’expression la queue entre les jambes. Abdoulaye Wade et Macky Sall appartenaient hier à une même meute de loups, à une même famille politique. Aujourd’hui leur territoire de chasse est différent. Comme quoi en politique les amitiés se font et se défont selon les intérêts. Les deux amis hier sont devenus aujourd’hui des adversaires jurés et l’un ne veut pas voir l’autre sur son domaine de chasse. C’est pourtant ce qui s’est produit et ils se sont battus pied à pied comme de vrais loups. Le vaincu reconnaît d’emblée le vainqueur.
Cependant, la précipitation avec laquelle Abdoulaye Wade a reconnu sa défaite laisse perplexe l’observateur attentif de la scène sénégalaise ces dernières années, ces derniers mois, pour ne pas dire ces derniers jours, et appelle certaines interrogations. Pourquoi Wade n’est-il pas allé au bout de sa logique comme Mamadou Tandja et bien d’autres, puisqu’il a bien commencé à mater sa population, à serrer la vis à elle ? Pourquoi a-t-il si vite s’avouer vaincu, fermer boutique ? Est-ce parce que l’armée ne lui est pas acquise pour les basses besognes comme c’est le cas au Togo ? Wade a-t-il tout simplement joué au bon perdant ? Est-il parti de gaieté de cœur ? Est-ce la sagesse qui a prévalu ? Ou plutôt y a-t-il un mobile qui sous-tend ce fléchissement aussi sec et presqu’inattendu ? Pour être plus clair, est-ce la peur de la très grave et l’ultime tempête qui se couve, synonyme inévitable de bain de sang, et qui a pour conséquence la traduction devant les tribunaux, qui a obligé l’octogénaire sénégalais au crane congénitalement chauve comme un œuf et aux lèvres en pied de marmite, retroussées, à courber si vélocement le dos ? La dernière hypothèse semble plus plausible. Bien évidemment, on ne peut parler de sagesse de Wade dans cette affaire. S’il était sage, il l’aurait prouvé aux Sénégalais, aux Africains et au monde entier en ne touchant pas à la constitution de son pays pour tenter de se maintenir à perpette au pouvoir. Changer unilatéralement la loi fondamentale de son pays comme l’avait fait le Togo (ceci me rappelle les coups de gueule intolérables de Fambaré Ouattara Natchaba, de Dahuku Péré et des autres qui se connaissent eux-mêmes et qui se disent aujourd’hui opposants en s’agitant à tout vent, ou tous coups comme un diable dans un bénitier, en cherchant à toute occasion, à tout moment à se faire une place au soleil des Togolais qui ont trop souffert dans leurs mains. Si le RPT est aujourd’hui ce qu’il est, c’est grâce à eux. S’ils sont aujourd’hui des milliardaires, c’est grâce au RPT) suivi en cela par l’Algérie, le Cameroun, le Gabon, le Niger…, c’est commettre un véritable délit contre sa société, contre la morale; bref, c’est une insulte à l’adresse de son peuple. Et ce n’est pas la gloire.
Comme les autres l’ont déjà et avec pertinence souligné, rien ne distingue Abdoulaye Wade d’un Éyadéma Gnassingbé, d’un Omar Bongo, d’un Sassou Nguesso, d’un Teodoro Obiang…, si ce n’est le fait qu’il est, lui, bardé de diplômes, avec de solides expériences professionnelles et politiques internationalement reconnues. Wade détient, faut-il le préciser, des diplômes presque en tout : en mathématiques, en physique et chimie, en morale, en psychologie, en sociologie, en droit, en économie…. Et comment un homme de cet acabit, de cette grandeur intellectuelle peut-il tomber à un tel degré d’abaissement, d’abjection en poussant sa soif de pouvoir si loin au point de se ridiculiser, de s’humilier à la face du monde et de n’être plus rien aux yeux de ceux qui l’adulaient hier ? Wade s’est mis lui-même plus bas que la terre et méritait d’être piétiné. Il a sur toute la ligne fauté; il n’a pas répondu aux attentes des Sénégalais, des Africains. Certes il reste sans conteste cet intellectuel de haut vol, hors pair, mais il n’a pas su marquer positivement l’histoire africaine, y entrer. Et il est alors comme ce colosse aux pieds d’argile tel que le dit Plutarque. C’est une géante statue avec une belle apparence mais qui n’a rien d’esthétique à l’intérieur, absolument rien si ce n’est la terre, les pierres et le plomb. Ce n’est que l’apparence, le faux clinquant, le faux semblant, le masque. Wade nous apprend encore une fois qu’il ne faut pas juger de l’arbre par l’écorce.

Ce qui réjouit du moins le monde, c’est que les Sénégalais n’ont pas manqué l’occasion de bien le malmener, de le tosser, de le battre à plates coutures. Il est arrivé au pouvoir en février 2000, la tête haute, le torse bombé sous les hourras et les applaudissements frénétiques des Sénégalais et, partant, des Africains sans exception aucune, surtout qu’il avait su battre campagne sous le slogan Sopi, qui signifie changement en Wolof, avec un programme absolument alléchant : «réduction de plus de moitié du prix des denrées de première nécessité, recrutement de tous les "maîtrisards-chômeurs", amnistie des détenus politiques casamançais, réintégration des quelque mille cinq cents policiers définitivement radiés à la suite de la rébellion d'avril 1987, instauration d'un authentique régime parlementaire...» Un tel programme lui avait permis de mettre fin à quarante ans de règne du parti socialiste. Mais Wade a-t-il tenu sa promesse ? Autant en apporte le vent. Les bons diseurs ne sont pas les grands faiseurs. Mais ce qui a le plus fâché et déçu le monde, c’est que le fameux changement (Sopi) devient le non-changement (le non-Sopi) d’autant qu’il ne voulait plus quitter, permettre à l’alternance démocratique de s’opérer, de continuer son chemin. Il voulait s’éterniser comme les tous autres mabouls qu’il critiquait pourtant hier et sans ménagement. Par ses frasques de vieillesse, ses nombreuses fautes impardonnables, et particulièrement sa soif inassouvissable de pouvoir, son ambition mesquine, à la limite pathologique, Wade quitte aujourd’hui le pouvoir confus et honteux, usé et discrédité, dégonflé come une baudruche, sans gloire ni honneur ni dignité. Il oublie qu’on reconnaît l’arbre à ses fruits et que bonne renommée vaut mieux ceinture dorée. Des honneurs, Wade n’en aura plus pour le temps qui lui reste à vivre. Car il n’est plus la gloire des sénégalais, des africains mais leur honte. Autrement dit, on ne vantera plus sa gloire. Il peut seulement se contenter des innombrables biens qu’il a engrangés au grand dam du peuple sénégalais, dont la liste m’a été communiquée par un ami au moment où je faisais ce papier, et que je voudrais soumettre ici au jugement de la raison de nos nobles lecteurs. Cela leur permettra, à l’évidence, de comprendre pourquoi l’avocat français William Bourdon et le journal Le Parisien évoquent son nom et celui de son fils «dans le cadre de l’affaire des ‘’biens mal acquis’’».
«La vérité sur le patrimoine d’Abdoulaye WADE 2008»
«1° - Une Villa au Point E, agrandie par le rachat de la villa voisine. Valeur estimée après transformation toujours en cours : 1 milliard.
2° - Un terrain de 5000 m2 à Yoff Layenne. Valeur estimée : 750 millions.
3° - Quatre terrains de 10.000 m2 aux Almadies. Valeur estimée : 8 milliards.
4° - 60 terrains de 500 m2 sur la VDN à hauteur de la Cité Gorgui. Valeur estimée : 6 milliards.
5° - 5 Immeubles de 6 étages contenant 4 appartements par étage. Valeur estimée : 7 milliards.
6° - 10 terrains de 200 m2 dans le domaine du Cices. Valeur estimée : 400 millions.
7° - 30 Hectares de terrain aux alentours de l'aéroport. Valeur estimée 60 milliards.
8 - Un terrain bientôt rasé de 3 hectares dans Dakar Centre-Ville. Valeur estimée : 30 milliards.
9 - Un immeuble de 10 étages à la Rue Docteur Theze. Valeur estimée : 2 milliards.
10 - Une cité de 20 villas sur la Corniche, à hauteur de la villa de l'ex-président Senghor. Valeur estimée 10 milliards.
11 - Un terrain de 10.000 m2 au niveau du Stade LSS. Valeur estimée : 1.750.000.000 f.
12 - Un terrain de 100 hectares à Touba.
13 - Un terrain de 150 hectares aux environs de Tivaouane.
14 - Une propriété de 10 hectares à Popenguine.
15 - Une cité de 100 maisons à louer à Kebemer.
16 - 60 maisons achetées du Plan Jaxaay.
17 - Des vergers et champs cultivés d'à peu près 5000 hectares répartis dans différentes régions du Sénégal.
18 - Une propriété à Versailles, en copropriété avec mon épouse, réfectionnée et étendue. Valeur estimée : 4 milliards.
19 - Un immeuble de 4 étages à Paris XVIème. Valeur estimée : 8 milliards.
20 - Une propriété à Montpellier - Une propriété à Bordeaux - Une villa en Côte d'Azur - Une villa à Orléans - Une maison de maître à Lilles - Une propriété dans le Michigan - Une propriété à New Orléans - Une propriété dans le Wisconsin - Un immeuble de 3 étages à New Jersey
21 - Un hôtel de 90 chambres à Casablanca - Un hôtel 60 chambres à Marrakech - Un hôtel de 48 chambres à Paris XIVème - un hôtel 50 chambres en Suisse.
22 - Des actions dans les structures suivantes, soit directement ou indirectement : AIBD (20 % des actions totales) - DAPORT Sénégal (30 % des actions) - BEN LADEN Sénégal (20 % des actions) - Dakar Dem Dikk (80 % des actions totales) - SATTAR ( 30 % des actions) - OIL Libya (30 % des actions) - ZAM ZAM (20 % des actions) - Jafza Sénégal (10 % des actions) - Veolia Sénégal (10 % des actions) - GECOM Industries (20 % des actions) - IRIS Sénégal ( 20 % des actions) - Expresso Sénégal (15 % des actions) - DELARUE Sénégal (5 % des actions) - MEDIATIQUE Afrique (10 % des actions) - AFRICA SALT (10 % des actions) - DP World Sénégal (10 % des actions) - HENAN Chine Sénégal (10 % des actions) - OFFNOR Shipping Sénégal (20 % des actions) - SERPM (Société d'Etude et de Réalisations des Phosphates de Matam, 25 % des actions) - Cabinet CICE (30 % des actions).
23 - Divers comptes en banque, soit à son nom ou au nom de Abdullah Wade, ou au nom de Aboula Tzipi Wade ou au nom de Abadalaye Fabien Wade : 4 comptes bancaires à Dubaï contenant respectivement : Commercial Bank Of Dubaï => 32,5 millions de dollars - CityBank => 26,3 millions de dollars - Emirate Bank => 16,1 millions de dollars - Standard Chartered Bank => 10,9 millions de dollars. 2 comptes bancaires à Chypres : Bank of Cyprus => 22 millions de dollars - Hellenic Bank => 14 millions de dollars. 4 comptes bancaires en Frances contenant respectivement : Société Générale => 17,6 millions d'euros - BNP Paribas => 14,3 millions d'euros - Ex-Credit Lyonnais => 8,2 millions d'euros - HSBC Paris => 3,2 millions d'euros. 2 comptes bancaires aux USA : Bank of America => 6,2 millions de dollars - HSBC => 2,8 millions de dollars. 2 comptes bancaires en Suisse : Banque Migros => 43 millions CHF - Banque Coop => 65,2 millions CHF
25° - Un parti politique dont il est le seul actionnaire à 100 %. Le patrimoine mobilier et immobilier du parti est en copropriété avec son fils Karim Ada : 500 voitures Pickup, 150 voitures 4x4, 35 voitures 8x8, 1 avion 20 places, 1 Péniche, 1 Yacht stationné à Nice, 1 permanence neuve construite sur un terrain de 5000 m2.»

Voilà la fortune d’une seule personne, d’une seule famille, alors que les Sénégalais ne trouvent pas à manger à leur faim, alors qu’ils peinent à vivre décemment, alors qu’ils «vivent pressés de nombreux soucis et au milieu des besoins non satisfaits». Plaise à Dieu que Wade trouve le repos mérité. Plaise à Dieu qu’il ne soit pas surtout étrillé, houspillé par les médias, les tribunaux les jours, les mois à venir, et qu’il n’en meure pas comme Omar Bongo du Gabon, du moment que bien mal acquis ne profite pas.

Tchakie Thomas Sékpona-M., Ph.D.