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Le Journal de l'Economie (Dakar)

Affaires et PME-Actualité
 Oumar K. Diop
Dakar

Abidjan, Lomé, Dakar, Bamako, Cotonou., le secteur informel s'incruste partout, vomit son lot de marchandises devant les carrefours, s'enhardit dans l'industrie de réparation, de la débrouille, soutenu par l'acquisition de matériels et de véhicules d'occasion.

Ce visage de l'informel est le même partout, il a pris réellement forme dans l'enquête commanditée par le Programme régional d'appui statistique à la surveillance multilatérale de l'Uemoa (Parstat) : caractéristiques du travail, production, revenus, insertion, problèmes, tous ces thèmes sont abordés dans l'enquête.

Travailler à Abidjan et à Bamako plutôt qu'à Dakar. C'est une résolution que prendrait un travailleur de l'informel lorsqu'il verrait le niveau des revenus mensuels moyens offerts par ce secteur dans les capitales de la zone Uemoa. Le revenu mensuel tourne autour de 79.600 francs CFA à Bamako et 94.000 à Abidjan, tandis qu'à Dakar, il se limite à 63.300 francs. On trouve les revenus les plus bas à Lomé. Cette distribution des revenus dans les capitales n'est pas tout à fait surprenante, elle correspond en général au poids économique de chaque pays. Ces résultats proviennent de l'enquête « le secteur informel dans les principales agglomérations l'Uemoa : performances, perspectives, insertion »

De manière générale dans la zone Uemoa, le revenu salarial moyen est estimé à 65.000 francs CFA. Dans toutes ces villes, on note que le revenu mensuel moyen du secteur informel est supérieur au salaire minimum garanti du secteur formel dans les Etats membres de l'Uemoa. Mais néanmoins, il existe de très fortes disparités : « la moitié des actifs du secteur informel gagne moins du revenu moyen ; par contre les patrons peuvent gagner 2,5 fois à 5 fois le revenu moyen des travailleurs de l'informel ».

Sur ces salaires, ne sont en général pas adossés des contrats de travail, les normes légales n'ayant pas cours dans le secteur informel. C'est la raison pour laquelle les horaires de travail sont très flexibles. Selon l'enquête, « 27 % des actifs du secteur informel dans les capitales de l'Union travaillent moins de 24 heures par semaine, mais ils sont près de la moitié à effectuer plus de 48 heures de travail par semaine. Ces horaires élevés constituent une forme de sous-emploi dans ce secteur, notamment dans le transport et la réparation.

Pas de normes légales, donc absence de protection sociale et précarité s'imposent dans le secteur : « 5% des enquêtés bénéficient d'un contrat de travail, les congés payés ne concernent que 1,3%. » Toutefois, les relations familiales et interpersonnelles entre dirigeants et salariés représentent une protection naturelle de l'employé contre les abus que l'on pourrait rencontrer dans ces conditions d'absences de normes légales.

Faiblesse de l'investissement et peu de capital Que l'on passe à Bamako, Dakar, Cotonou, ou à Abidjan, le constat est le même : le secteur informel est caractérisé par la faiblesse ou l'absence de capital dans le processus de production. Cependant, d'une capitale à l'autre la proportion d'unités de production informelle sans capital varie : - de 5% à Abidjan, 11% à Dakar, 28 % à Bamako. La moyenne des unités de production informelles sans capital tourne autour de 10 % dans l'Uemoa. L'absence de capital concerne surtout la branche du commerce. Le capital du secteur informel est constitué surtout de terrains, de locaux, de machines et de véhicules. Les équipements sont achetés à l'état neuf pour moitié à Ouagadougou, Niamey e Bamako, près des deux tiers à Cotonou, Abidjan et Lomé.

Le capital investi provient le plus souvent de l'épargne, des dons et de l'héritage. Ces trois sources de capital représentent « 65 % du financement d'une entreprise du secteur informelle à Dakar et 95% à Ouagadougou ». Le financement bancaire et le micro-crédit restent marginaux, à l'exception de Cotonou et de Ouagadougou, où respectivement 43% et 50 % des financements proviennent des structures formelles de financement.

Peu de capital, peu d'investissement. Les entreprises du secteur informel dans la zone peinent à accroître leur développement faute d'investissement, donc de production et de revenus. Le montant moyen de l'investissement d'une unité de production informelle est de 35.800 francs CFA. On peut constater que l'investissement est la plus faible dans la capitale sénégalaise, moins de 10.000 francs en moyenne.

L'absence de fonds propres explique le peu d'effort en matière d'investissement, mais elle explique également le recours difficile à l'emprunt. Seuls 8,3% des unités de production informelles de l'Uemoa ont emprunté au cours de 2001/2002. Le montant moyen de l'emprunt d'une entreprise informelle est de 1,3 millions de francs CFA. La moyenne au Sénégal est de 207.000 francs, de 76.000 à Niamey et 2,5 millions à Abidjan.

Poids économique du secteur informel L'enquête a dénombré plus 1,6 millions d'unités de production informelle, avec une taille moyenne de 1,5 personnes par établissement : « le secteur informel est massivement composé de micro-unités et d'auto-emploi ». Selon l'enquête, la dynamique de ces unités relève plus d'une logique de création/génération d'emplois que d'une véritable dynamique d'entreprise.

Toutefois, ces unités si petites soient-elles représentent un maillon important de l'économie urbaine. En moyenne, on compte dans les capitales de la zone Uemoa, une unité de production informelle par ménage. Ce qui signifie tout simplement que dans chaque maison, une partie ou la totalité des revenus proviennent du secteur informel.

De Dakar à Abidjan, en passant par Lomé et Niamey, les unités de production informelles représentent une part importante de la valeur ajoutée urbaine. Sur l'ensemble des sept pays de l'Union, les unités de production informelle de Dakar, Bamako et Abidjan, représentent 84 % de la valeur ajoutée totale et 81% de la production totale. En termes de répartition par branche d'activité, le commerce représente 35 % de la valeur ajoutée, l'industrie 30 % et les services 35 %. Mais suivant les villes cette répartition peut changer : le commerce est plus marqué à Ouagadougou (48% de la valeur ajoutée), alors qu'à Lomé et Abidjan les services contribuent pour 40 % de la valeur ajoutée.

Utiles socio-économique ment, les unités de production informelles se caractérisent par leur précarité. Les conditions d'exercice sont difficiles dans l'informel. Pour s'en rendre compte, il suffit tout simplement de mesurer les résultats de l'enquête : « moins de 22 % des entreprises répertoriées disposent d'un local spécifique pour leur activité, 31 % exercent à domicile ou chez un client, 92% n'ont pas accès à l'eau courante et 78% à l'électricité.

Qui sont les clients du secteur informel ? 66 % de la production du secteur est destiné aux ménages. 23 % de la production est absorbée par les entreprises informelles et les autres opérateurs reçoivent les 12 %. Le secteur informel ne représente qu'une offre domestique, il n'exporte pas.

L'enquête commanditée par la Commission de l'Uemoa dans les sept villes de l'Uemoa, montre combien l'informel est homogène d'une ville africaine à une autre. Il est saisissant de voir que sauf quelques exceptions, les résultats de l'enquête sur l'Uemoa sont à peu près les mêmes pour Dakar (voir Le Journal de l'Econmie N°436). On demande à une entreprise de l'informel de Ouagadougou de lister ses principaux problèmes, elle stigmatisera les mêmes difficultés qu'une entreprise de Dakar. Globalement plus d'un chef d'unité de production informelle dans la sous-région met ses difficultés sous le compte des problèmes d'écoulement de ses produits. Les autres difficultés concernent l'accès au crédit et son coût, l'inadéquation du local d'activité, les difficultés pour assurer un approvisionnement régulier en matières premières.