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Transhumance : Le village Bado manifeste contre les bouviers

Togo - Societe
Depuis juillet dernier, les populations de Bado font face à des visiteurs trop dérangeants pour leurs cultures. Il s’agit des bœufs appartenant au sieur El Hadj Ousman Ali qui détruisent des champs de maïs, de manioc et d’autres cultures. Ce qui en rajoute à la situation précaire des habitants de Bado dont l’horizon est plein de doutes à l’annonce de l’installation du cimentier Dangote dans le milieu, comme le révèle le mensuel « Le Citoyen » dans sa parution du mardi 11 septembre 2018.
Objets sans cesse des intrusions de bêtes dans leurs champs, les habitants de ce village situé dans la préfecture de Vo ont maintes fois interpellé les autorités locales. « Il y a presque 4 mois que les ressortissants de la zone de Nyto avaient tiré la sonnette d’alarme suite aux dégâts causés par les bœufs d’El Hadj Ousman Ali », lit-on dans un courrier adressé à la CEDEAO. Dans la correspondance signée du Président du Comité villageois de développement (CVD), il y est relevé un silence radio depuis que le préfet les a reçus. Pour eux, le problème dépasse leur autorité locale et c’est ce qui les a décidés à se tourner vers l’instance sous-régionale qu’est la CEDEAO. « De quel droit s’arrogent les bergers peuhls en se hissant fatalement au-dessus de la loi » ?, s’interrogent KoukpanlonKossi, le Président du CVD et les siens.

Pour eux, les bouviers bénéficient sans doute des soutiens qui les couvrent dans leurs forfaitures. « Il est inadmissible qu’ils détruisent, nuisent, tuent sans être inquiétés », dénoncent-ils. Et c’est face à cette indifférence des autorités togolaises à leur endroit que les habitants de cette localité ont saisi la CEDEAO et décidé de manifester demain pour se faire entendre, d’autant plus qu’ils se « voient exposés à la faim, à la pauvreté et à l’indigence alors qu’aucune mesure n’est prise pour y remédier ». La manifestation de demain se veut décisive. Et il y a fort à craindre quand on sait qu’au Togo, les affrontements entre les populations autochtones et les bouviers nomades dégénèrent souvent et occasionnent des pertes en vies humaines.

Le Togo fait face à de multiples conflits entre les peuhls et les populations locales. On enregistre ces dernières années, des affrontements violents dus à la transhumance. Dans un communiqué rendu public en 2017, le Mouvement Martin Luther King a dénoncé des actes de violence qui mettent à mal la cohésion nationale due aux pâturages des bœufs dans certaines localités du pays. Le mouvement a relevé par exemple qu’à Klatome dans le canton d’Afagnan (Préfecture de Bas-Mono), un peuhl a coupé la main à un habitant. Il y est fait cas aussi des violences à Gboto (dans le Yoto), à Alokoègbé (dans le Zio). Aussi, les bouviers sont-ils soupçonnés dans des braquages. Le déplacement saisonnier des bêtes est devenu source d’insécurité dans les localités et même dans des hameaux les plus reculés et le phénomène n’est pas près de s’arrêter avec ce qui s’annonce dans le canton de Dagbati.

Pourtant, les autorités togolaises ont semblé prendre le problème à bras-le-corps, notamment par les sorties de YarkDamehame, ministre de la Sécurité et de la Protection civile et du Col Ouro Koura Agadazi, ministre de l’Agriculture, de l’Elevage et de la Pêche.

Mais la persistance des dégâts causés par les bêtes et les bouviers a fait dire à certains que les autorités sont prises à leur propre piège puisque certains d’eux disposent de troupeaux de bœufs qu’ils confient aux peuhls. Ces mêmes sources affirment que certains bouviers circulent avec des armes pour protéger les bêtes, mais à la nuit tombée, ils se déguisent en coupeurs de route.

Loin de stigmatiser les peuhls, la cohabitation avec les populations autochtones est source de conflit, avec en toile de fond des préjugés. Et c’est pour instaurer un climat de bien vivre que les autorités togolaises ont également pris des mesures telles que le respect de la période de migration, l’utilisation de corridors prédéfinis afin d’éviter la destruction des cultures par les bêtes. Ces dispositions destinées à apaiser les tensions entre bouviers nomades et populations locales rencontrent des réticences.

La CEDEAO prise au mot

La résurgence des conflits illustre la complexité du problème et surtout l’implication effective des autorités afin qu’elles anticipent sur d’éventuels affrontements, comme la manifestation prévue demain à Bado. « La population réclame le départ pur et simple d’El Hadj Ousman Ali dans la zone », insistent les populations dans la lettre adressée à la CEDEAO. Une requête formulée avec détermination puisqu’elles disent « passer par tous les moyens pour défendre » leurs intérêts. L’instance communautaire sous-régionale est donc appelée à jouer sa partition pour le dénouement de la tension dans cette localité du Togo.

La CEDEAO est donc très attendue par les populations de Bado. Elles veulent la prendre au mot. En effet, lors du dernier sommet CEDEAO/CEEAC tenu à Lomé, les chefs d’Etat et de gouvernement ont énuméré une série de recommandations dans laquelle il est soulevé le problème de transhumance. Pour prévenir ces conflits, ils ont instruit leurs ministres en charge de l’Agriculture et de la sécurité « à engager des consultations régulières, avec la participation des organisations d’agriculteurs et d’éleveurs, dans le but d’identifier les mesures pour prévenir et gérer pacifiquement ces conflits ».

Aussi ont-ils demandé à leurs ministres « d’identifier les mesures pour prévenir et gérer pacifiquement ces conflits » qui sont en partie liés « aux effets négatifs des changements climatiques ». Vivement que la CEDEAO, vole au secours des populations de Bado et des autres localités du pays en proie aux affrontements dus à la transhumance.