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Discussions politiques/Communiqué de la facilitation : La C14 contre une fausse interprétation

Togo - Politique
Les Togolais ont attendu jusque dans la soirée de ce mercredi 27 juin pour connaître le menu des discussions politiques intervenues entre les deux facilitateurs désignés par la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), le président ghanéen Nana Akufo-Addo et celui de la Guinée, Alpha Condé, et les protagonistes de la crise. Le communiqué final sanctionnant ces discussions, aujourd’hui objet de plusieurs interprétations surtout de la part du régime de Faure Gnassingbé, n’a visiblement fait ressortir que les mesures d’apaisement. L’on comprend que les vraies propositions de sortie de crise seront laissées à l’appréciation de la CEDEAO lors de son sommet qui se tiendra à Lomé à la fin du mois de juillet. Toutefois, les facilitateurs ont sorti trois points essentiels qui tiennent à cœur, pour l’instant, au peuple togolais, tout en prenant acte des positions et préoccupations de chacune des parties au dialogue intertogolais.
En attendant les hypothétiques armes perdues que cherchent depuis dix (10) mois le ministre de la Sécurité et de la Protection civile, Yark Damehame, et tout le gouvernement, les facilitateurs leur ont demandé de garantir le droit de manifester aux populations sur toute l’étendue du territoire national, même dans les villes assiégées depuis plusieurs mois. « Les facilitateurs invitent le gouvernement à étudier la possibilité d’étendre le droit de manifester à l’ensemble du territoire national dans le respect de l’ordre public et des lois en vigueur, afin de garantir la liberté de manifester ainsi que la sécurité des biens et des personnes », indique le communiqué final. Ils ont ensuite demandé la libération de toutes les personnes arrêtées lors des manifestations de l’opposition depuis août 2017. Nana Akufo-Addo et Alpha Condé se sont ensuite félicités de l’accord entre les parties de laisser l’Assemblée nationale en place jusqu’à l’élection de nouveaux députés, selon les dispositions de la Constitution. « Durant ces périodes, les préparatifs des élections restent suspendus, étant entendu qu’il est souhaitable que ces élections se tiennent avant fin novembre 2018 », poursuit le document. A en croire les deux facilitateurs, les positions et préoccupations des parties feront l’objet de rapport aux autres chefs d’Etat de la CEDEAO lors du prochain sommet.

Comme on peut le souligner, le président du Ghana et celui de la Guinée se sont seulement limités aux mesures devant permettre une atmosphère apaisée pour la poursuite des efforts de recherche de solution à la crise politique togolaise. Les propositions de sortie de crise (transition, réformes, élections) reviennent visiblement à la CEDEAO. Mais déjà, ce communiqué des facilitateurs est interprété de diverses manières par les parties, surtout le régime en place qui veut tirer le drap de son côté.

Le pouvoir divague

Au RPT/UNIR, on jubile déjà parce que les facilitateurs auraient donné une date (avant fin novembre) pour la tenue des élections législatives. Ce qui, d’ailleurs, était une position connue de tous depuis un moment, surtout avec le discours de Faure Gnassingbé le 27 avril 2018 et la sortie de la Cour constitutionnelle le 4 juin. « Je crois que tous les efforts vont converger vers l’organisation et la tenue des élections dont la date a été indiquée, à savoir nous allons œuvrer et travailler pour que d’ici fin novembre 2018, les Togolais puissent s’exprimer dans les urnes », déclare Gilbert Bawara, ministre de la Fonction publique, du Travail et de la Réforme administrative, présent dans la délégation du parti au pouvoir mercredi lors des discussions. S’agissant de la suspension du processus électoral dont mention a faite par le communiqué de la facilitation, Gilbert Bawara, comme on le lui connaît, verse dans des divagations. « C’était déjà le cas depuis longtemps. Je ne suis pas certain que l’un de nous ici serait en mesure d’évoquer un seul acte qui démontrerait que le processus électoral avait continué », peste-t-il. Mais dans le même temps, il soutient : « Je pense que tous les moyens seront mis en œuvre pour qu’à l’échéance de fin novembre 2018, les Togolais puissent aller aux urnes et s’exprimer librement ».

Cette intervention soulève la curiosité des uns et des autres, surtout qu’on parle de la suspension du processus électoral, et en même temps de la tenue des élections d’ici fin novembre. Mathématiquement, il reste un peu plus de trois mois pour cette échéance. Et donc selon de nombreux observateurs, il n’est pas possible que le gouvernement puisse organiser les élections à cette date, si tant est qu’il a suspendu le processus depuis quelque temps. De plus, l’organisation d’élections au Togo sans les réformes constitutionnelles, institutionnelles et électorales n’est pas de nature à garantir un climat de paix dans le pays. C’est justement ce qui reste le souci de la CEDEAO. A moins que le régime soit à même d’opérer les réformes appropriées avant l’échéance.

Pour le moment, Gilbert Bawara et son mentor peuvent continuer les supputations, les interprétations de tout genre pour tenter de se donner une crédibilité. Ce qui est sûr, les élections avant fin novembre sont presque impossibles à organiser. D’ailleurs, comme l’ont indiqué les facilitateurs, ce n’est pas une date qui s’impose aux Togolais.

La Coalition des 14 attend les décisions de la CEDEAO

La Coalition des 14 partis de l’opposition s’étonne de cette interprétation que donne le régime du communiqué de la facilitation. Pour elle, l’échéance de fin novembre ne s’impose pas aux partis politiques. « Ils (Ndlr, les facilitateurs) ont cru devoir indiquer une date souhaitable pour les élections. Nous avons cherché à comprendre pourquoi cette date, ils nous ont dit qu’elle ne s’impose pas du tout et que ce qu’il faut retenir, c’est qu’on a adopté le principe de suspendre la préparation des élections, mais ça ne peut pas être sine die. Alors c’est juste une date qui est mise à titre indicatif pour nous amener à prendre conscience de ce qu’on doit rapidement faire les réformes qu’il faut, s’entendre sur un calendrier pour les élections », indique la Coordinatrice de la Coalition des 14, Mme Brigitte KafuiAdjamagbo-Johnson.

A l’en croire, les facilitateurs ont pris en compte leurs propositions et préoccupations pour une sortie de crise. « Ils nous ont dit qu’avec ces propositions, ils vont rendre compte à leurs pairs durant le prochain sommet de la CEDEAO pour recevoir un mandat plus large qui permettra de se prononcer et de nous faire des propositions au sujet de ce que l’opposition a demandé », ajoute-t-elle. La Secrétaire Générale de la CDPA n’exclut pas des manifestations publiques dans les prochains jours, puisque la facilitation vient d’enjoindre le gouvernement de « garantir ce droit » aux Togolais. « C’est la première fois qu’on dit de manière très claire que le droit de manifester doit être rétabli sur toute l’étendue du territoire et que ce droit de manifestation soit exercé conformément à la législation en vigueur », souligne-t-elle ensuite.

Pour elle, en outre, l’essentiel des mesures pour une sortie de crise doit être examiné par la CEDEAO. Ce n’est donc pas le moment de faire des conclusions hâtives (comme dans certains milieux) pour tenter de montrer que la solution est déjà trouvée à la crise. Les facilitateurs « ne se sont prononcés aujourd’hui dans l’intention de faire des propositions de sortie de crise », relève Mme Brigitte Adjamagbo-Johnson.

C’est pourquoi la question de la transition n’a pas été très abordée lors des discussions. « Cette exigence de l’opposition va être présentée à la CEDEAO. Vous avez entendu le président Alpha Conde dire aujourd’hui qu’ils ne devraient pas se comporter comme dans un syndicat de chefs d’Etat. Nous le prenons au mot. Le 31 juillet, c’est bientôt de toute façon », laisse-t-elle entendre. Elle a tenu à mettre en garde, lors de la conférence de presse organisée par la Coalition hier, Gilbert Bawara pour sa prétention à organiser des élections en novembre. « Je veux mettre en garde Gilbert Bawara, comme nous l’avions signifié hier (mercredi, Ndlr)aux facilitateurs. Quand ils nous ont dit que la date là est une date tout simplement indicative, nous leur avons dit que nous savons à qui nous avons affaire. Dans ce pays, vous nous avez demandé de poser un geste de bonne volonté en acceptant de suspendre les manifestations, ils s’en sont saisis pour en faire une obligation d’interdiction de manifester. Nous ne voulons plus qu’ils transforment la date indicative en une obligation d’organiser les élections avant fin novembre. Et c’est ce qu’ils essayent de faire déjà », affirme-t-elle, avant d’ajouter : « On nous a dit que c’est un consensus qui doit s’établir sur les conditions d’organisation des élections. Il faut que monsieur Bawara sache que c’est ensemble que nous devons définir les conditions dans lesquelles on va tout reprendre. Qu’il sache que ce qu’ils sont en train de faire en ce moment dans la clandestinité ne sera pas reconnu. On les a vus hier tout excités comme des gens qui se croient en position de devoir continuer la préparation d’élections frauduleuses. Il faut que Bawara se désillusionne. Les Togolais sont déterminés. Il n’y aura plus d’élections frauduleuses. Nous voulons rassurer le peuple togolais que notre boussole, c’est leur aspiration ».

La Coalition des 14 partis de l’opposition attend la feuille de route de la CEDEAO.
Dans tous les cas, si certains pensent que la date évoquée par les deux facilitateurs, Nana Akufo-Addo du Ghana et Alpha Conde de la Guinée, est une injonction faite aux parties prenantes de la crise, l’intervention de ces derniers lors de la cérémonie d’ouverture des travaux mercredi dernier semble dire le contraire.

« Nous ne devons pas être des chefs d’Etat complaisants. Nous ne venons pas au Togo pour être solidaires de tel ou tel. Nous ne venons pas non plus en donneur de leçon. Mais notre objectif est d’accompagner la classe politique togolaise, mouvance présidentielle comme de l’opposition, à trouver une solution pacifique pour le bonheur du peuple togolais. En tout cas, nous serons impartiaaux, nous venons en frère, parce que quand la case de ton voisin brûle et tu ne l’éteins pas, le feu va atteindre aussi ta case. Nous avons donc intérêt à la paix pour le développement du peuple togolais », indique Alpha Conde, président de la Guinée. De quoi rafraîchir la mémoire au régime en place.