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La composition de la hiérarchie militaire,voilà le problème togolais!

Togo - Opinions
„…Il faudrait que les leaders de la coalition de l´opposition fassent un effort pour créer un cadre de discussion avec les responsables de la hiérarchie militaire de notre armée. Il s´agirait de leur rappeler le rôle qui devrait être le leur et les assurer que l´alternance politique ne serait pas dirigée contre eux. Ce cadre de discussion pourrait par exemple être animé par des experts militaires nationaux, sous régionaux ou internationaux. Des officiers des armées des pays de la CEDEAO pourraient rencontrer et échanger avec des officiers au sein de la hiérarchie militaire du Togo.
La coaltion de l´opposition aura auparavant exposé et expliqué aux dirigeants de la CEDEAO et à d´autres pays amis le gros obstacle à la démocratisation que constitue l´armée togolaise…“
Voilà l´extrait d´un article que j´avais publié le 03 décembre 2017 pour proposer des mesures à prendre au cas où l´armée de notre pays continuerait à refuser de se mettre du côté du peuple.

Aujourd´hui où c´est devenu une habitude que l´armée togolaise, par ses comportements, s´érige en ennemi irréductible du peuple pour défendre le pouvoir politique. Aujourd´hui où le pouvoir ne se gêne plus pour envoyer des militaires et des forces spéciales pour étouffer et réprimer dans le sang les marches pacifiques en lieu et place de la police et de la gendarmerie, il est clair que les déclarations d´apaisement envers les forces de sécurité et de défense pour qu´elles reviennent à de meilleurs sentiments, ne servent plus à rien. Car l´armée a choisi son camp depuis longtemps, ou plutôt l´armée est incorporée au pouvoir politique depuis le régime Gnassingbé Éyadéma. Le fait que cette armée soit atypique, parce que ne répondant pas aux normes d´une armée représentative de toutes les couches de la nation togolaise, rend le problème plus difficile.

C´est un secret de Polichinelle que notre armée est tribalisée à outrance et que sa hiérarchie dans sa composition n´est autre que le bras armé du pouvoir politique incarné par Faure Gnassingbé. Dans une telle situation où le régime refuse toute idée d´alternance, donc de démocratie sincère, il ne peut le faire qu´en comptant sur un allié de poids que constituent les forces armées.

Malheureusement pour les togolais Éyadéma était en avance sur son temps quand il mettait sur pied son plan diabolique d´un règne éternel sur notre pays. Régionaliste et tribaliste pur sang, l´homme a patiemment nourri à dessein un monstre que constitue aujourd´hui cette armée anti-peuple, dont nous avons toutes les peines du monde à nous en débarrasser. Parmi beaucoup d´anciens officiers à la retraite, compagnons du défunt dictateur, originaires de toutes les régions du Togo, il y avait ceux qui pouvaient arrêter le fou, mais ne l´avaient pas fait, préférant les avantages et les délices immédiats que procure le pouvoir. Beaucoup de ces généraux-traîtres étaient les principaux animateurs de la mascarade qui plaça Faure Gnassingbé sur le fauteuil présidentiel à la mort de son père en février 2005.

La joie des togolais d´être enfin libérés d´un régime de terreur aura donc été courte, très courte. Comme pour annoncer les couleurs d´une nouvelle ère de dictature, Faure Gnassingbé accepte de marcher sur plus de 500 cadavres de ses compatriotes pour s´installer à la présidence. Et tout ceci n´était possible que par le fait d´une armée non républicaine, tribalisée, commandée par une hiérarchie militaire tribale, sinon familiale. Dans une telle situation le peuple ne peut pas se targuer d´avoir une armée sur laquelle il peut compter pour remettre de l´ordre dans la maison quand les choses tournent au vinaigre. Se débarrasser d´un tyran par exemple. L´armée faisant corps avec le tyran, comme c´est le cas au Togo, le peuple contestataire devient et l´ennemi du tyran, et l´ennemi des forces armées qui croient devoir leur survie au tyran usurpateur et vice-versa.

Le caractère non républicain de l´armée togolaise n´est pas une invention des opposants ou de tous les autres détracteurs qui en veulent à Faure Gnassingbé et à son régime. Son caractère partisan en faveur du pouvoir en place s´est à plusieurs reprises illustré depuis Éyadéma et surtout depuis l´installation manu militari de Faure Gnassingbé au pouvoir en 2005 d´abord, ensuite au cours de mascarades d´élections en 2010 et en 2015.

Depuis le 19 aoûjt 2017, début des manifestations de l´opposition pour le retour à la constitution de 1992, au lieu de la gendarmerie et de la police, on note l´immixtion de l´armée, surtout de son corps d´élite, les parachutistes pour massacrer les populations à travers le pays.
Dès les premières manifestations Faure Gnassingbé et la hiérarchie militaire, composée uniquement des membres de la famille Gnassingbé et des familles alliées, n´avaient pas hésité à envoyer les bérets rouges à Mango, Bafilo et Sokodé pour tirer à balles réelles, bastonner les populations même dans les domiciles privés. On dénombra des morts et des blessés. Beaucoup de togolais dans ces trois localités avaient dû prendre le chemin de la brousse pour échapper à la barbarie militaire, parmi eux plusieurs blessés graves.

Qui oubliera cet octobre noir en 2017 où les parachutistes de l´armée togolaise, accompagnés de miliciens, dans la foulée de l´enlèvement de l´Imam Alassane, prirent d´assaut Sokodé et tous les villages environnants pour bastonner, humilier, détruire des commerces et voler? Après plus d´une semaine de sauvagerie, le bilan, fait de morts, de blessés graves à qui on avait refusé des soins, était sans appel. La terreur était telle que beaucoup de réfugiés en brousse avaient préféré ne pas revenir et continuèrent pour un exil lointain. Depuis, les militaires n´ont jamais quitté Mango, Bafilo et Sokodé bien que la levée des sièges militaires dans ces localités soit inscrite parmi les mesures d´apaisement avant le dialogue politique.

Les dernières exactions de militaires samedi à Sokodé, Kparatao, Kadambara, Djarkpang´na, Kpalimé, Lomé... lors de la dernière journée de manifestations organisées par la coalition de l´opposition, viennent nous confirmer, comme s´il en était encore besoin, que Faure Gnassingbé, Ministre de la Défense, et la hiérarchie militaire considèrent le peuple contestataire comme un ennemi à abattre. Dans leur entendement le pouvoir politique n´appartient pas au peuple, il est un héritage à défendre, donc une question de vie ou de mort.

Et une telle vision des choses n´est possible que dans un pays où l´armée n´est en fait qu´une coquille vide, le pouvoir réel de décision étant entre les mains d´une minorité inféodée au pouvoir politique.

Une telle hiérarchie militaire dans sa configuration actuelle n´est pas et ne sera jamais une bonne chose pour l´instauration d´une démocratie digne de ce nom. C´est pourquoi je réitère ma proposition faite en décembre dernier dans mon article intitulé: "De la nécessité du cantonnement de "l´armée togolaise" sous le contrôle des forces de la CEDEAO ou de l´ONU".
Avant toutes choses la coalition de l´opposition doit mettre sur la table de certains chefs d´état "poids lourds" de la CEDEAO le problème que constituent l´armée togolaise et sa hiérarchie, dont fait partie Faure Gnassingbé, pour une véritable alternance politique au Togo. Je sais qu´elle l´a déjà fait sous d´autres formes et que les chefs d´état de la sous-région doivent avoir déjà eu vent du caractère antirépublicain des formes armées togolaises. Mais en tant que victimes, nous avons le devoir de continuer à crier pour nous faire entendre.

Le géant de la sous-région, le Nigeria, semble avoir une oreille attentive pour la souffrance des togolais par la voix de son président Mohamed Buhari; mais il revient à l´opposition togolaise de continuer à prendre d´assaut les chancelleries pour dénoncer et présenter les preuves du martyr que vivent les togolais et les togolaises depuis plusieurs décennies par la faute d´une armée pas comme les autres. C´est à ce prix que les hors-la-loi au sein de l´armée togolaise, et surtout au sein de sa hiérarchie pourront être mis hors d´état de nuire. Car les togolais rêvent du jour où ils pourront voir défiler et applaudir une armée togolaise digne de ce nom, débarrassée de pseudo-généraux qui ne doivent leur promotion qu´en faisant assassiner leurs compatriotes.

Samari Tchadjobo