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Violences policières en France sur des journalistes: Reporters sans frontières saisit le Défenseur des droits

France - Societe
De “Nuit debout” aux manifestations contre la loi travail en passant par les rassemblements post-électoraux, les violences policières contre des journalistes dans des manifestations se sont multipliées en France ces derniers mois. Pour que cessent ces débordements, Reporters sans frontières (RSF) saisit le Défenseur des droits des cas de dix journalistes malmenés ou brutalisés sans justification par les forces de l’ordre.
Couvrir une manifestation ou un événement public en France est aujourd’hui devenu une activité à haut risque pour les reporters et les photographes, qu’un brassard presse ne suffit plus à protéger face aux forces de l’ordre. Vidéos et photos à l’appui, RSF a pu constater de nombreux cas de violences policières, parfois délibérées, contre des journalistes. Pour dénoncer ces agissements, RSF saisit aujourd’hui le Défenseur des droits Jacques Toubon des cas de dix journalistes ayant subi des violences de la part de membres de la police ou de la gendarmerie, alors qu’ils ne faisaient que leur métier, celui de couvrir des événements qui concernent la collectivité, de rapporter des informations sur leur déroulement et de les diffuser au public. Ces dix dossiers illustrent une tendance plus large à laquelle de nombreux autres journalistes ont été confrontés ces derniers mois.

“Nous saisissons le Défenseur des droits afin qu’il mène des investigations, qu’il demande des sanctions le cas échéant, et surtout qu’il adresse des recommandations fermes et précises aux autorités, notamment celle de respecter la liberté d’informer des journalistes, déclare Paul Coppin, responsable juridique de RSF. Exercer des violences contre des journalistes qui couvrent des manifestations relève d’une forme de censure, que nous demandons au Défenseur de condamner sans détour.”

Certains des cas que RSF soumet au Défenseur concernent des journalistes qui ont reçu des coups de la part des forces de l’ordre, comme Maxime Reynié, photographe, qui a été frappé par des CRS en mars 2016 pendant une manifestation à Toulouse, bien qu’il ait très clairement fait valoir sa qualité de journaliste. De même pour Michel Soudais, rédacteur en chef adjoint de l’hebdo Politis, qui a reçu, sans motif, un coup de matraque dans le ventre de la part d’un CRS, et pour Martin Lagardère, photographe, brutalisé par un membre des compagnies de sécurisation et d'intervention (CSI) pendant une manifestation alors qu’il cherchait à prendre des photos.

D’autres ont été violemment maîtrisés, malmenés, sans motif, par les forces de l’ordre. Le journaliste Thierry Vincent a ainsi été jeté à terre par un CRS et a perdu connaissance pendant qu’il couvrait une manifestation en mai 2016, alors qu’il avait préalablement fait valoir sa qualité de journaliste.

D’autres ont été victimes d’un usage non autorisé des armes de défense par les forces de l’ordre, comme Estelle Ruiz, parfaitement identifiable comme journaliste, qui a reçu un tir délibéré d’une grenade de désencerclement alors qu’elle filmait un rassemblement en mai 2017. Les journalistes Ugo Amez, Louis Witter et Michael Bunel ont tous trois été victimes de tirs de « flashball », tirs qui étaient soit tendu, soit à bout portant, soit dirigé vers le visage.

Nombreux aussi sont ceux qui ont subi des blessures à la suite de ces violences, voire se sont vus reconnaître des jours d'ITT (incapacité de travail). Ugo Amez a dû être arrêté trois jours après avoir reçu un tir tendu de flashball, Michel Bunel a eu le doigt brisé par un coup de matraque.

Plusieurs enfin témoignent d’insultes, de menaces, de propos outrageants… Louis Witter a été menacé, Michel Bunel insulté, une autre journaliste qui souhaite rester anonyme a subi des humiliations à caractère sexuel…

Tous ces journalistes étaient pourtant identifiés comme tels, ou aisément identifiables, aucun ne participait à la manifestation, et aucun n’avait exercé de violence, tenu de propos déplacés, ou commis le moindre acte qui aurait pu justifier une telle réponse des forces de l'ordre. Si Reporters sans frontières reconnaît sans équivoque la difficulté du travail de la police, notamment dans le contexte actuel – celui de l'état d’urgence, des attentats répétés – cette difficulté ne peut en aucun cas justifier que les journalistes soient victimes de violences délibérées de leur part.

Les évènements que couvraient ces dix reporters, qu’il s’agisse de manifestations, de rassemblements, d’opérations policières, constituaient un sujet d’intérêt public. La couverture de ce type d'événements permet d’informer les citoyens sur leur tenue, de relayer les griefs ou les aspirations qui y sont exprimées, de rapporter la manière dont les autorités y répondent, etc. La couverture complète et précise des manifestations est fondamentale pour le droit du public à l’information.

C’est bien une forme de restriction, donc de censure, par l’Etat, sur une presse libre, que RSF demande au Défenseur des droits de condamner. Il est essentiel que, dans le cadre de ses compétences relatives au respect de la déontologie des professionnels de la sécurité, il rappelle aux autorités leurs obligations en terme de protection des journalistes et de respect de la liberté de la presse.