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Les bruits de demande de rappel de l’ambassadeur de l’UE du Togo

Togo - Diplomatie
Beaucoup de bruits ont circulé depuis mercredi sur une expulsion actée du représentant de l’Union Européenne au Togo. Partie de nos confrères de «La Lettre du Continent», l’information a rapidement été relayée par des médias en ligne et les journaux parus hier. Qu’en est-il en réalité ?
Dans son article, notre confrère de « La Lettre du Continent » a fait état d’une demande de rappel du représentant de l’Union Européenne au Togo, Nicolas Berlanga-Martinez; demande qui serait formulée par le pouvoir de Lomé, transmise, en début de mois, par le ministre en charge du Travail et de la Fonction Publique, Gilbert Bawara, au Chargé de la section Afrique au Service Européen des Affaires Extérieures (SEAE).

24 heures après la divulgation des informations, ni l’Union Européenne, ni la présidence n’a réagi. Hier jeudi, curieusement, l’ambassadeur de l’Union Européenne a été aperçu à l’ouverture des douzièmes journées des communes du Togo qui coïncident avec les 20 ans d’existence de l’Union des Communes du Togo (UCT). Toujours aussi en verve comme à son habitude. « L’UCT a 20 ans. Il faut préciser que l’UCT est plus âgée que la moyenne d’âge de votre population. Vous savez qu’au Togo la moyenne d’âge est à 19 ans. C’est un appel à la réflexion », a-t-il par exemple lancé en début d’intervention, arrachant un rire collectif à l’assistance.

Nicolas Berlanga-Martinez n’a surtout pas manqué de revenir, quoique subtilement, sur la question de la décentralisation, chère à lui. « Au-delà de la dimension politique liée aux élections locales, au-delà de leurs dimensions économiques, je voudrais profiter des occasions que vous m’offrez pour partager un message strictement opérationnel. En 2007, des projets financés par l’UE démarrent dans 8 villes du Togo (Atakpamé, Dapaong, Tsévié, Sokodé, Kara, Notsè, Aného et Lomé) qui portent sur l’accès à l’eau potable ou à l’assainissement, la construction de latrines, la gestion de déchets ou la prévention d’inondation. Ce projet pour un montant total de plus de 44,5 milliards de F CFA, oui 44,5 milliards de F CFA, représente plusieurs années de budget de gestion et d’investissement des villes concernées. Nous ne pouvons pas fermer les yeux face à l’évidence des conditions extrêmement difficiles dans lesquelles fonctionnent aussi bien les institutions déconcentrées de l’Etat que les institutions décentralisées », a-t-il plaidé. Il annonce même le lancement prochain d’un autre projet de plus 13 milliards, financé par l’Union Européenne et aussi par d’autres partenaires comme la France.

A l’ouverture des journées de l’UCT, Berlanga n’a pas livré un discours d’au-revoir ni celui d’un diplomate qui faisait déjà ses valises. Cela, naturellement, ne démontre pas en soi l’information apportée ou relayée par nos confrères. Berlanga quittera-t-il le Togo ? Certainement dans quelques mois, à la fin de son accréditation d’ailleurs finissant au Togo. Le pouvoir tenterait-il de se séparer de lui avant terme ? Peut-être. Mais une chose est évidente, le diplomate n’est surtout pas aimé au sein du pouvoir. Il est, disons-le, détesté par ceux qui ont la vérité en horreur et qui abondent autour de Faure Gnassingbé. Plusieurs fois, ce dernier a lui-même menacé de renvoyer l’euro-diplomate s’il continuait par tenir le discours de franchise qu’on lui connaît. Faure a-t-il fini par mettre ses menaces à exécution ? On le saura très vite.

L’histoire retiendra que Nicolas Berlanga-Martinez n’a pas été au Togo qu’un représentant de l’Union Européenne et défenseur des intérêts de cette dernière. Il a été un promoteur des valeurs universelles défendues par son institution que sont le dialogue, la démocratie. Il a surtout et souvent attiré l’attention sur ce qui devrait constituer le cœur des actions de l’Exécutif : les plus vulnérables au sein de la population. Presqu’à chaque fois, il fait mention à la jeunesse et de ses préoccupations. Bref, c’est le seul ambassadeur qui, depuis trois ans, ne se contente pas de s’encombrer des propos diplomatiques. Il est le seul qui sait attirer l’attention sur l’essentiel. « La multiplication des initiatives de dialogue sans résultats tangibles contribue aussi au sentiment de frustration et à la résignation qui engendrent l’immobilisme de la société », déclarait-il en juillet dernier à la suite de l’atelier du HCRRUN. Cet ancien militaire de 54 ans et qui occupe son premier poste d’ambassadeur au Togo, après avoir été conseiller à la représentation de l’UE au Cameroun, ne manquait surtout pas de continuer par garantir les appuis moraux, techniques et institutionnels au Togo. Ces trois dernières années, l’Union européenne a appuyé énormément notre pays. D’ailleurs, on apprend que l’institution européenne a mis à la disposition du Togo, une enveloppe d’environ deux cent millions pour l’organisation du sommet sur la sécurité maritime. Cela n’a pas empêché le très hautain Gilbert Bawara, de déclarer sur les ondes d’une radio que le Togo n’avait pas besoin des quelque 300 millions de l’UE pour lesquels cette dernière « infantilise » le Togo. Rien d’étonnant que ce soit lui, et non le ministre des Affaires étrangères, qui aurait été chargé de notifier la décision du pouvoir de Lomé à Bruxelles.

Que ce soit maintenant ou quelques mois plus tard, le diplomate européen ne perdra rien en quittant le Togo. Le pays, a contrario, perdra quelqu’un qui a œuvré activement pendant trois ans à faire bouger les lignes, non sans s’attirer des ennuis dans les deux camps politiques. Naturellement au sein du pouvoir, mais tout aussi curieux que cela puisse paraître, dans l’opposition aussi. Chaque camp l’accusant de faire le jeu de son adversaire.

La tension permanente créée et entretenue autour du représentant de l’UE par le pouvoir montre une fois encore que Faure et compagnie ne sont nullement prêts à faire les moindres concessions d’ouverture démocratique, ne serait-ce que pour supporter des divergences de point de vue. On le voit bien que, du Rpt à Unir, les réflexes sont restés les mêmes, quoique plus subtiles, mais toujours autant nuisibles que sulfureux, avec pour seul et même objectif : conserver le pouvoir à vie.

Mensah K.