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Interview De Me Mouhamed Tchassona-Traoré : "Le Temps Ou Nous Pensions qu’il y avait des méchants d’un côté et des bons de l’autre est passé"

Togo - Politique
Me Mouhamed Tchassona-Traoré, président du Mouvement citoyen pour la démocratie et le développement (MCD) est un personnage politique qui a de la suite dans les idées et le prouve à chacune de ses sorties médiatiques. Le natif de Sokodé a sa lecture de la situation sociopolitique du Togo et tient à la partager avec les Togolais. Il revient dans l’interview ci-dessous, sur les sujets chauds de l’heure à savoir le scandale des Panama Papers avec les évasions fiscales découvertes dans l’industrie WACEM, les réformes politiques, les résultats des travaux du Hcrrun et la proposition de loi introduite par l’ANC et ADDI devant le parlement. Que dit-il réellement sur tous ces sujets, voici pour vous l’intégralité de ses propos.
Bonjour Me Mouhamed Tchassona-Traoré. Vous êtes le président du MCD, une formation politique très présente dans le débat sociopolitique de notre pays. Quelle analyse faites-vous des révélations faites par la presse dans le dossier Panama Papers ?

La finance s’est beaucoup structurée au plan international et ceci à tous les niveaux. Ce n’est plus possible de faire des dépôts en liquide dans des banques à travers le monde sans attirer l’attention.

Nous avions cette appréhension depuis longtemps que le Togo également puisse être au nombre des pays où ce scandale pourrait avoir droit de cité. Connaissant un peu la propension d’un certain nombre de personnes ici, qui prennent des libertés avec les richesses du pays. Donc ça n’a pas été pour nous un étonnement, ça fait partie des choses auxquelles nous nous attendions. Ceci dit, il faut affirmer que nous n’avions pas encore l’étendue ou l’entièreté de tout ce que les gens prennent comme libertés avec les biens du pays.

Nous osons croire que pour une fois, le gouvernement togolais prendra de la hauteur et que les gens reviendraient au respect des lois qui régissent le fonctionnement des sociétés au Togo. Ce n’est pour rien, si au niveau international les gens ont travaillé afin qu’on ait des textes communautaires, quel que soit le pays d’où on vient.

Les textes de l’OHADA sont là, ils ont été financés à grand frais par la banque mondiale et beaucoup de bailleurs de fonds. C’est pour que nous ayons une meilleure lecture de la vie des sociétés dans notre cas. Il faut dire que cela ne règle pas sur le fond le problème de la transparence dans les entreprises. Il y a à côté, des textes nationaux qui doivent être appliqués. Nous interrogeons le Code minier.

Sur le fond, il n’est nullement interdit à des citoyens d’avoir des actions dans des sociétés commerciales. Ce qui est interdit, c’est de prendre la direction de ces sociétés lorsqu’on occupe un certain nombre de fonction. Mais la difficulté que nous avons au Togo, est liée au fait que la quasi-totalité des actionnaires de nationalité togolaise dans cette société ressortent d’une seule formation politique de sorte que ça devient inquiétant.

Ça repose globalement le problème de la gestion de nos finances, de notre économie. Nous avons souvent l’habitude de dire que le Togo n’a pas de schéma économique visible. Nous n’avons pas d’éléments structurant autours desquels on peut bâtir sur le long terme, une économie. Nous avons comme l’impression qu’on navigue à vue et ça nous conduit à des scandales tels que celui des Panama Papers.

Voilà ce que nous pouvons dire sur cette question.



Mettre un ministre aussi longtemps à des postes de souveraineté comme celui-là, ça pose un problème. Rarement on a vu dans certains pays des gens passer plus de 3 ans à un poste de ministre de l’Economie et des fiances parce que lorsqu’on passe trop de temps à ces genres de postes, on finit par prendre des galons. On finit par faire ombrage à tout ce qui peut aider à la bonne conduite des affaires économique dans le pays.

Nous pensons que l’action gouvernementale est trop prévisible. Notre port n’est plus que l’ombre de lui-même et tous les efforts pour la captation des recettes au niveau de l’OTR ne produisent pas les effets escomptés. Tout cela n’est que le résultat de cette prévisibilité au niveau de l’action gouvernementale et de la programmation au niveau des hommes et des femmes qui sont à même d’apporter des réponses qui correspondent à la volonté populaire et qui obéissent à un certain nombre de règles de bonne gouvernance.

Pour une fois on a vu que le ministre des Finances qui était devenu un frein à l’avancée du pays a été éjecté. Mais est-ce que cela doit s’arrêter à ce niveau ? Il faut à notre avis, des mesures d’ordre structurel, des mesures d’ordre fonctionnel pour que notre pays renoue avec le décollage économique.

Sur un plan purement politique, on parle de réformes et vos amis de l’ANC et de l’ADDI ont soumis une proposition de loi. Quelle est votre avis sur cette démarche ?

Toute initiative d’où qu’elle vienne et du moment qu’elle tend à faire évoluer les choses, elle ne peut être que la bienvenue. Mais la question essentielle qu’on se pose est de savoir la philosophie derrière cette action de nos amis. L’homme politique mesure parfois son action à l’aune de trois critères déterminants. L’action que je m’apprête à poser est-elle nécessaire ? Je crois qu’ici l’action était nécessaire parce qu’il fallait introduire un projet de loi ou toute autre initiative pour régler le problème des réformes.

La seconde question est de savoir si les moyens utilisés pour le faire sont efficaces ? Dans ce cas aussi, nous répondons par l’affirmative car c’est l’un des moyens que nous offre la constitution pour nous faire entendre.

La 3è question est de savoir si la démarche était opportune ? Mais à ce niveau peut-être qu’il y a matière à débat car au jour d’aujourd’hui, nous savons tous qu’il y a eu deux tentatives. La 1ère venait du gouvernement et a été rejeté en bloc. La seconde tentative est venue de l’opposition. C’était le CAR et l’ADDI. On a vu quel accueil a été également réservé à cette tentative au niveau de l’Assemblée nationale.

Beaucoup de Togolais craignent que cette 3è tentative ne subisse le même sort que les précédentes. C’est là où nous parlons de l’opportunité de l’action politique. L’opportunité d’autant plus qu’il y a d’autres initiatives qui ont été prises comme l’atelier du Hcrrun. Je crois qu’il aurait fallu qu’on voie si cette initiative du Hcrrun aurait pu prospérer avant qu’on introduisît un projet de loi. L’initiative du Hcrrun était bien connue avant la proposition de loi.

Il faut aussi dire que le problème des réformes ne se limite pas à la problématique de la limitation des mandats et du mode de scrutin. La question des réformes va au-delà de ces questions-là. Elle englobe un certain nombre de mécanismes qu’on pouvait inscrire dans le marbre de notre constitution pour que beaucoup de situations que nous déplorons aujourd’hui puissent être réglées. Et donc on aurait pu saisir l’initiative de cet atelier pour voir si l’atelier allait pouvoir régler l’ensemble de ces problématiques pour que la proposition de loi puisse les reprendre à ses comptes afin qu’on ne soit plus obligés de revenir à ces querelles byzantines qui font que nous piétinons. C’est à ce niveau que nous avons quelques légers doutes.

Sur le fond nous sommes d’accord qu’on ne peut pas repousser ces problèmes tous les jours.

Tout ce que je peux souhaiter, c’est que nous fassions en sorte qu’on puisse avancer ensemble dans le pays. Le temps où nous pensions qu’il y avait des méchants d’un côté et des bons de l’autre est passé. Ces attitudes nous ont fait beaucoup de torts et il faut dorénavant que nous travaillions à faire en sorte que l’espoir renaisse dans ce pays.

Propos recueillis par Olivier A.