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Mobilisation pour les réformes politiques : Un test réussi pour CAP 2015, et maintenant ?

Togo - Politique
L’opposition togolaise renoue avec la rue. Samedi dernier, dans les artères de Lomé, des milliers de Togolais ont répondu à l’appel du Combat pour l’alternance politique en 2015 (CAP 2015) pour « exiger les réformes constitutionnelles, institutionnelles et électorales prévues par l’Accord Politique Global (APG) signé en 2006 ». Ses leaders entendent amener le gouvernement à mettre en œuvre de façon consensuelle, transparente, participative, le processus de décentralisation et l’organisation transparente, équitable et crédible des élections locales.
Une mobilisation réussie

Au rythme des vuvuzelas, des casseroles, des klaxons de motos, de Bè-Kondjindji au côté plage du Palais de la Marina, en passant par Deckon, la fontaine lumineuse, des Togolais hostiles au pouvoir clanique de Lomé II ont dit non à « la minorité qui pille le pays », « au tribalisme, au despotisme, à l’arbitraire ».

Cette marche de l’opposition a bénéficié du soutien des Togolais vivant à l’étranger qui réclament le droit de vote. « Nous voulons une armée républicaine digne », «Le peuple togolais exige les réformes politiques », « La diaspora togolaise réclame les réformes politiques », a-t-on écrit sur les pancartes. « Nous sommes plus de 2 millions de Togolais à l’étranger. Et vous imaginez qu’on exclue les voix de ces 2 millions au Togo. Nous participons au budget national et contribuons au développement de ce pays. Pourquoi ne pas avoir le droit de vote ? », a pesté Eric Ekoue, un Togolais résidant à Londres qui a conduit la délégation de la diaspora. « S’il n’y a pas de réformes, aucune élection crédible et transparente n’est possible. Sinon ce seraient des élections volées d’avance », a confié Nicodème Habia, leader du parti Les Démocrates qui a soutenu l’initiative du Cap 2015. Autre soutien de taille, celui de Nubuéké, un mouvement citoyen. « Nous soutenons à 100% cette marche. La mobilisation de ce samedi prouve que les Togolais ont besoin de ces réformes pour amorcer un nouveau départ de la marche démocratique », a confié à L’Alternative son président, Enos Tchalla.

Depuis la récente présidentielle du 24 avril 2015 qui a consacré la réélection frauduleuse de Faure Gnassingbé, c’est la première mobilisation d’envergure pour l’opposition. « C’est la toute première grande manifestation que nous faisons, un ans après l’élection présidentielle. Les populations étaient un peu perdues et s’étaient plongées dans une léthargie, pour reprendre les termes de la lettre pastorale des Evêques du Togo. Nous avons voulu responsabiliser les populations, leur redonner la parole parce que ce sont elles qui déterminent le chemin, la voie à suivre. On leur a lancé l’appel et elles sont sorties nombreuses. C’est notre satisfaction », s’est réjoui Patrick Lawson-Banku, Vice-président de l’Anc.

Depuis plusieurs années, le Togo continue de sombrer dans des dérives dictatoriales. Les questions des réformes politiques ne sont pas des choses nouvelles sous les tropiques. Des engagements ont été pris et plusieurs accords signés pour sortir le Togo de l’impasse. Mais le régime cinquantenaire du père en fils refuse de traduire dans les faits l’Accord Cadre de Lomé (ACL) signé à Lomé, le 29 juillet 1999, les 22 engagements pris par le gouvernement togolais devant l’Union Européenne à Bruxelles le 14 avril 2004, l’Accord Politique Global (APG) signé à Lomé le 20 août 2006. « La récente lettre pastorale de la Conférence des évêques du Togo à l’occasion de la commémoration du 56ème anniversaire de l’Indépendance du Togo, le 27 avril 2016, confirme la dégradation continuelle de la situation sociopolitique du pays, face à l’immobilisme sclérosant dans lequel se complait le régime RPT/UNIR sans se soucier du vécu quotidien des populations togolaises caractérisé par la misère, la précarité et l’extrême pauvreté. A ce jour, en effet, ces réformes qui doivent contribuer au règlement juste et durable de la crise sociopolitique qui mine le Togo, sont restées lettres mortes, se heurtant au refus obstiné du père et à l’entêtement du fils, malgré la parole donnée. Il est incompréhensible et préoccupant que les gouvernements successifs du système RPT/UNIR s’emploient ainsi, Chef de l’Etat en tête, à se soustraire au respect des engagements pris et maintes fois renouvelés aussi bien devant la nation togolaise que devant la communauté internationale», a souligné, dans une déclaration liminaire, le Cap 2015 qui fort du soutien massif des populations togolaises, « dénonce et condamne fermement l’attitude du parti au pouvoir qui, par le refus de mettre en œuvre les réformes, met en danger notre pays le Togo en perpétuant le cycle infernal élection frauduleuse contestée, répression sanglante et simulacre, CAP 2015 recommande le dialogue ».

Il demande donc au gouvernement de procéder « courageusement et en toute responsabilité, dans une démarche consensuelle et républicaine » à l’adoption et la mise en œuvre consensuelle des réformes constitutionnelles, institutionnelles et électorales prescrites par l’APG ; à la mise en œuvre des recommandations de la CVJR, notamment la limitation du mandat présidentiel, le mode de scrutin à deux tours, la lutte contre l’impunité ; au rétablissement dans leurs droits des représentants de CAP 2015 à la CENI ; à la participation représentative de l’opposition à la HAAC, à la CNDH, à la Cour des Comptes, à la Cour Constitutionnelle et à la Cour suprême ; à l’adoption et à la mise en œuvre consensuelle de la feuille de route du processus de la décentralisation et l’organisation consensuelle des élections locales ; à la libération des militants et des dirigeants des partis de l’opposition abusivement détenus ; à la levée des inculpations arbitraires.

Le CAP 2015 exige le libre retour des personnes contraintes à l’exil suite aux incendies des marchés de Kara et de Lomé en janvier 2013 et des autres prisonniers politiques dont la Cour de Justice de la CEDEAO et la Commission des Droits de l’Homme des Nations Unies réclament l’élargissement. Selon les responsables du CAP 2015, les questions relatives au cadre institutionnel de la décentralisation, aux échelons de collectivités territoriales et leur configuration, au découpage électoral, au mode de scrutin, au fichier électoral, aux transferts de compétences et à l’information, la sensibilisation et la formation des divers acteurs concernés, doivent faire l’objet de concertations.

Quel lendemain à cette mobilisation ?

La mobilisation du samedi dernier a été pour l’opposition un test réussi. Le Cap 2015 annonce des séries d’action d’envergure. « Ensemble avec le peuple togolais en lutte pour recouvrer sa dignité bafouée par plus d’un demi-siècle d’une dictature implacable et déshumanisante, CAP 2015 poursuivra ses actions de mobilisation, notamment par l’organisation de manifestations publiques sur toute l’étendue du territoire nationale jusqu’à la réalisation des réformes politiques et électorales auxquelles le gouvernement RPT/UNIR s’est engagé », ont lancé les leaders d’opposition.

Mais reste à voir si elle va réussir à capitaliser cette mobilisation pour tourner la page de la dictature des Gnassingbé et concrétiser l’alternance, pour qu’enfin le pays « retrouve son harmonie, la paix nécessaire pour son évolution démocratique ». Comme le cas au Burkina Faso, où la détermination de la rue a fait partir Blaise Compaoré du pouvoir et réaliser l’alternance politique. C’est à ce tournant que Cap 2015 est attendu. A la veille des prochaines élections législatives et présidentielle, ces réformes sont impératives.

PCK (L'ALTERNATIVE)