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Mango ou le manque de confiance du peuple en ses gouvernants

Togo - Opinions
La région de Mango connait une turbulence politico-sociale depuis la décision prise par le Gouvernement de restaurer l’aire protégée communément appelée “Faune de Mango.”
Selon le rapport de François Pactuel, chercheur d’Amnesty International pour l’Afrique de l’Ouest, cette turbulence a causé la mort d’un commissaire de police du côté de l’autorité (et des blessés probablement), une dizaine de morts et environ une centaine de blessés, du côté de la population locale.
Cet événement qui ensanglante notre pays est à déplorer et à condamner.
Au-delà du regret et de la condamnation, des questions fondamentales sur la décision du Gouvernement de rétablir la Faune de Mango, la réaction de la population locale et des personnalités politiques dites de l’opposition s’imposent.

Définir et protéger une aire protégée: une décision profitable pour tous
La faune et la flore jouent un rôle primordial dans l’équilibre des sociétés humaines. Si une partie de cette nature doit nécessairement être détruite pour permettre aux enfants, femmes et hommes de vivre, la survie de ces mêmes hommes dépend également et absolument de la protection d’une part de cette même nature.
À cette heure de l’épuisement des ressources naturelles et du changement climatique induit par les activités anthropiques démesurées, il devient urgent pour l’homme de définir des zones naturelles et de les protéger. Ce projet piloté évitera notamment la disparition de certaines espèces végétales et animales, favorisera l’apport des pluies nécessaires à la croissance des semences, luttera contre la pollution de la nature et préservera la bonne santé des populations traditionnelles.
En outre, les aires protégées génèrent des activités touristiques de même que des emplois.
Restaurer des aires détruites, en définir d’autres et les protéger devient donc une opération de sauvetage de l’humanité.
Dans ces conditions, la décision du Gouvernement de restaurer des aires sauvagement détruites au gré de la folie des faux élans démocratiques et l’incompréhension abusive qu’on en a faite, ne peut qu’aller dans le bon sens.
Pour pousser loin, faut-il rapidement rappeler qu’à la suite du souffle meurtrier du Vent de l’Est, les populations togolaises ont, qui par rancoeur légitime mais aveugle, qui par interprétation abusive de la notion même de démocratie, procédé au saccage et à la destruction systématique des aires protégées. Ainsi, furent-elles complètement ravagées par exemple, la forêt classée de Kpalimé et la faune de Mango. Les arbres tropicaux sont alors abattus pour servir de charbon de bois, les animaux traqués, tués pour se retrouver dans la sauce de la vendeuse du foufou local, succulente consommation de quelques nantis.
Finalement, peu de gens ont profité de cette activité. Malheureusement, c’est toute la population locale qui pâtit durablement de ses effets pervers.
Pourquoi alors cette décision du Gouvernement, apparemment profitable pour tous, a-t-elle connu une opposition drastique de la population locale au point de causer des morts et des blessés?

La réaction de la population de Mango à la décision de la restauration de la faune
La réaction de la population de Mango à la très apparemment bonne décision du Gouvernement de restaurer la faune se résume au slogan suivant: “Mango a connu Djoua. Mango ne veut plus ni d’un autre Djoua avec Awaté, ni d’une nouvelle faune.”
L’association Djoua - Faune dans le slogan de la contestation de Mango n’est pas du tout fortuite.
En effet, avant la années 1990 où cette aire protégée est encore dans son embonpoint, le Colonel Djoua, dans sa mission de protéger la faune, aurait usé de la force excessive contre la population locale.
Le journaliste Carlos Ketehou a tenté de résumer en 10 points, les raisons de cette opposition à la restauration de la faune dont les “charges” qui pèsent sur le Colonel.
Si ces raisons peuvent être fortement discutées en certains de ses points, force est de dire que les façons dont elles sont utilisées dans cette crise actuelle montrent bien la méfiance voire défiance de la population de Mango et au-delà nationale, vis-à-vis des décisions des responsables togolais dans la gestion globale de la Cité, même si de telles décisions vont parfois fondamentalement dans le sens du bien être des gouvernés.
Pourquoi alors cette méfiance/défiance?

L’opposition systématique des populations contre les décisions du Gouvernement
Sans entrer dans la méli-mélo des sens/interprétations que font les populations africaines et logiquement togolaise de la démocratie, où chaque individu joue parfois à son propre jeu et règles, disons tout simplement que si les populations de Mango et togolaises défient souvent les décisions de ceux qui les gouvernent, c’est d’une part parce qu’elles ne se reconnaissent pas entièrement dans leur gouvernement et conséquemment ne s’approprient pas les décisions prises par celui-ci, d’autre part le gouvernement ne lève pas cette voile de la non-identification, de la non-reconnaissance de ses gouvernés par une démarche systématique de consultation des populations sur les actions qui les concernent directement.
Cette erreur fait que, par exemple, les démons de la Faune de Mango resurgissent avec à la clé, une réaction disproportionnée et une intervention tout aussi disproportionnée des forces de l’ordre.
Ce conflit s’est durci avec le jeu de certaines personnalités politiques de l’opposition, qui manquant cruellement d’idées pour faire avancer durablement le Togo, utilisent les ressentiments légitimes des populations pour manifester leur existence déjà forte essoufflée.
Devant un tel schéma classique qui fait mal au Togo, des leçons à court et à long termes doivent être tirées de cette situation douloureuse du “cas Mango.”

Des décisions à court et long termes de gouverner le Togo
Les événements de Mango auraient causé des morts et des blessés dans les deux camps.
Dans le but de calmer la situation et de relancer le projet de rétablissement de la faune, il est de la responsabilité du Gouvernement de faire le plus grand pas: mener une enquête, situer les responsabilités et parler à la population locale. Il faut nécessairement indemniser les victimes qui doivent être indemnisées et faire une démarche d’explication quant à la nécessité de restaurer l’aire protégée.
Il faudra faire en sorte que la population locale s’approprie le projet pour une protection durable de la faune.
Dans une démarche de gouvernance globale, il incombe aux hommes politiques de notre pays de développer une culture de consultation systématique des populations sur des projets qui les concernent et au-delà, rétablir la confiance du peuple en ses responsables à travers l’establishment des femmes et des hommes de son choix.