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Laté, le distributeur automatique de l’argent de la diaspora

Togo - Faits divers
On ne le dira jamais assez. L’argent que la diaspora envoie au pays contribue énormément au développement de l’économie. Mais seulement, quand on regarde un peu comment certaines personnes, qui ont leurs frères et sœurs à l’étranger, gèrent parfois cet argent, il y a de quoi s’indigner.
Il ne faut qu’être seulement au pays pour ne pas apercevoir comment un frère ou une sœur « grattent la terre » ou défie le froid et la neige en Europe ou en Amérique avant d’envoyer, ne serait-ce qu’un petit euro ou dollar à ses parents. Mais Laté qui est au chômage depuis plusieurs années ne se soucie guère de la situation.

Plus rien ne marche pour ce jeune homme obligé de faire les pieds de grue dans la maison de ses beaux parents à Bè-Kpota. C’est là qu’il arrive à trouver ses repas quotidiens, puisque vu la situation, il a demandé à sa femme de déménager chez ses parents avec les enfants, le temps de trouver un boulot. La maison familiale où il vivait avec sa petite famille est devenue presque un champ de bataille où il se bagarre avec ses frères qui le trouvent « paumé ».

Alerté par la situation de son frère, l’aîné de Laté qui réside aux Etats-Unis décide de lui venir en aide en lui envoyant de l’argent pour qu’il loue une chambre et commence un business, afin de mettre sa femme et ses enfants à l’abri. La somme promise à Laté était de un million de F CFA. L’attente a été longue et Laté a commencé par désespérer.

Mais à la grande surprise des beaux parents un lundi matin du mois de septembre dernier, le jeune homme (qui a disparu la veille) a commencé par crier dans la maison. « Vous êtes tous des pauvres dans cette maison. Est-ce que vous pouvez avoir de l’argent comme moi ? Je suis le sommet des sommets, le sommet de l’Himalaya. Je suis le boucantier du quartier », grondait-il, puant de l’alcool.

Qu’est-ce qui arrive à ce jeune homme, se demandait son beau-père qui tentait en vain de le calmer. Personne ne comprenait ce qui arrive à Laté. C’est lorsqu’un petit garçon a fait irruption dans la maison en tendant trois billets de 10 000 F CFA et deux billets de 5 000 F CFA et dit : « Fofovi a laissé cet argent dehors sur la route » que tout le monde finit par se rendre compte de ce qui se passait. Le million promis à Laté par son frère des Etats-Unis est rentré dans sa poche.

Depuis, il semble ne plus reconnaître ses beaux-parents, même pas sa femme qui le soutenait dans la misère. Il a commencé la bamboula dans le quartier BK (Bè-Kpota).

Tous ceux qui rencontraient Laté durant ces périodes sont gratifiés de billets de banque. Il lui arrive de déchirer des billets de dix mille francs sous prétextes qu’ils ne sont plus bons à utiliser. Il est devenu un distributeur automatique de billets de banque.

Tout le monde se demandait jusqu’à quand cette bamboula va durer, surtout avec un petit million en ces temps de soudure à Lomé. Et dire qu’il y a quelques encore, ce jeune homme trouve difficilement de quoi se mettre sous les dents.

Il pense rendre service à ses amis et frères qui l’avaient abandonné, mais qui, aujourd’hui, l’accompagnent partout comme des mouches. Ils se tapent des bouteilles de bières à rompre leur vessie, dans les bars de la capitale.

Visiblement, la chambre à louer et le petit commerce ne sont plus la préoccupation de Laté. On se demande comment réagira son grand-frère aux Etats-Unis lorsqu’il apprendra ce à quoi ont servi à Lomé les fruits de ses efforts.

I.K.