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Refus manifeste des réformes par le pouvoir :L’alternative qui reste désormais aux partisans de l’alternance

Togo - Politique

Le grand enjeu du prochain scrutin présidentiel, c’est l’alternance au pouvoir. Et l’exécution des réformes paraissait la voix idéale pour y parvenir. Mais voilà, elles sont vouées à l’échec, le pouvoir n’en voulant visiblement pas. Et à l’allure où va le processus, on s’achemine vers à un scrutin sans les réformes constitutionnelles et institutionnelles. Les Togolais doivent-ils alors faire une croix sur l’alternance ? N’y a-t-il vraiment plus d’alternative ? C’est ici que des observateurs avisés évoquent celle de la participation massive des populations au scrutin comme la panacée.

Vers un scrutin sans réformes

C’est le scénario qui se profile à l’horizon, et c’est une réalité à laquelle l’on devra commencer à se résoudre. Faure Gnassingbé a d’ailleurs suffisamment montré son manque de volonté à exécuter les réformes. Faut-il le rappeler, le projet de loi introduit au forceps à l’Assemblée nationale par le gouvernement a été rejeté le 30 juin dernier par les députés de l’Union pour la République (Unir). Et la proposition de loi des députés de l’opposition ne devrait visiblement pas connaitre un meilleur sort. Les discussions enclenchées le 5 janvier à la Commission des lois n’ont pas fait long feu, à cause de la requête capricieuse des députés du pouvoir qui demandent deux mandats de plus pour leur champion. Des sources annoncent tout de même leur reprise imminente. Mais pour quelle suite ? Le processus est simplement dans l’impasse. « La Constitution en vigueur sera rigoureusement respectée », déclarait Faure Gnassingbé à Accra le 25 novembre dernier. Et visiblement, tout est fait afin que ce soit cette Constitution tripatouillée qui préside à l’organisation du scrutin.

Dire que l’on s’achemine vers la tenue du scrutin sans les réformes nécessaires à sa transparence, à son équité et à son apaisement, peut sonner comme du fatalisme, surtout que la frange consciente de l’opposition continue de mettre la pression pour la mise en œuvre des réformes constitutionnelles et institutionnelles. A l’appel du Combat pour l’alternance politique en 2015 (Cap 2015) et de la synergie des Organisations de défense des droits de l’Homme (Oddh), les militants, sympathisants et les populations de Lomé et de ses environs manifestent de façon non stop depuis la semaine dernière. La dynamique devrait continuer, après une pause décrétée cette semaine afin de permettre aux électeurs d’aller s’inscrire sur les listes électorales.

Seule la pression populaire paraît indiquée pour arracher ces réformes, et la démarche du Cap et ses alliés est légitime à plus d’un titre. Mais l’idéal serait qu’elle soit vraiment forte. Mais, c’est constant que ces marches ne mobilisent pas des foules. La mobilisation a semblé décroitre de toute la semaine passée. Est-ce dû à l’impressionnant déploiement militaire et son effet intimidant ou bien au désintérêt total des populations du débat électoral et de la question de l’alternance ? « C’est bien dommage que les Togolais ne comprennent pas l’enjeu de ces réformes », regrette un leader politique. Mais, on va vers la tenue du scrutin sans les réformes nécessaires à sa transparence, à son équité et à son apaisement.

Mobilisation massive des électeurs comme alternative

C’est un secret de polichinelle l’enjeu de l’élection présidentielle à venir, c’est l’alternance au pouvoir, un idéal espéré depuis un demi-siècle par le peuple dont le destin est confisqué par une seule famille, les Gnassingbé. Et les réformes sont nécessaires pour son avènement. Mais devant le refus manifeste du pouvoir de les mettre en œuvre, la mobilisation des électeurs partisans de l’alternance dans les prochaines phases décisives du processus apparaît aux yeux de bien d’analystes comme la solution alternative pour sauver ses chances de survenue. Et cela commence par la révision des listes électorales censée se tenir du 20 janvier au 23 février. L’opération débute donc demain.

A en croire une communication de la Ceni, l’inscription sur les listes électorales concerne les Togolaises et les Togolais âgés de 18 ans révolus à la date de révision et non-inscrits sur la liste électorale. Pour justifier son identité, l’électeur doit produire l’une des pièces suivantes : passeport, carte nationale d’identité, carte consulaire, livret de pension civile ou militaire ou livret de famille. Et pour les « sans pièce », un notable du quartier ou de la localité est mis à leur disposition pour les assister. Sont également concernés par l’opération de révision des listes électorales, les anciens électeurs ayant perdu leur carte de 2013 qui devront obtenir un duplicata ; ceux ayant changé de lieu de résidence, qui disposent de leur carte d’électeur et devront requérir un transfert ; les votants qui ont changé de lieu de résidence et perdu leur carte d’électeur qui auront besoin d’un duplicata et d’un transfert ; et enfin ceux qui ont leur carte, mais ne retrouveraient pas leur nom sur la liste affichée. Par ailleurs, il est demandé aux parents d’électeurs décédés depuis 2013, de le signaler dans les centres de révision des listes électorales pour leur radiation, et recommandé aux électeurs inscrits en 2013 de retrouver leur carte d’électeur et de bien la conserver, car c’est cette même carte qui sera utilisée pour le scrutin de 2015.

Pour une optimalisation du recensement, tout le territoire est maillé en zones. Et selon la subdivision faite par la Commission électorale nationale indépendante (Céni), c’est la Zone 1 comprenant le Grand Lomé, la région Maritime en plus des préfectures d’Agou et de Kloto, qui devra ouvrir le bal demain, et ce jusqu’au lundi 26 janvier. L’opération est donc censée durer dans cette zone une semaine. Selon les chiffres officiels, la population électorale était de 3.044.332 électeurs en 2013. Et à en croire le président de la Ceni, Taffa Tabiou, ce sont en tout 600 000 nouveaux électeurs qui sont attendus au cours de cette opération, en tenant compte du taux d’accroissement et des citoyens majeurs qui n’avaient pas pu s’inscrire sur la liste électorale des législatives de juillet 2013. Ce qui devra faire au finish une masse électorale de plus de 3,6 millions de votants. Avis donc aux citoyens en âge de voter et partisans de l’alternance de se mobiliser massivement pour cette opération. Et ils devront être aussi nombreux le jour J pour accomplir leur devoir civique. C’est aussi de la responsabilité des forces de l’alternance de les y convier.

Les petits calculs fort utiles

Selon les statistiques officielles, ils étaient seulement 2.011.203 électeurs à aller accomplir leur devoir civique le 25 juillet 2013 sur un total de 3.044.332 inscrits. Soit une participation de 66,06 %. En clair, il restait environ 35 % des électeurs, soit un peu plus d’un million de Togolais, qui ont choisi de ne pas voter. Et généralement, ce ne sont pas les partisans du pouvoir Rpt/Unir qui boycottent les scrutins. Eux, ils sont souvent motivés par de petits gestes constitués de distributions de billets de banque, de produits alimentaires et autres gadgets à y participer. Très souvent, ce sont les sympathisants de l’opposition, dégoûtés par les conditions d’organisation, le manque d’union de toute l’opposition et pessimistes sur l’issue du scrutin, qui optent pour le boycott. « Même si je vote, c’est toujours le même résultat à la fin », « Ce n’est vraiment pas la peine de voter si mon suffrage doit être détourné », « Je ne vais aller perdre mon temps, aller rester sous le chaud soleil inutilement », « Quelle que soit la mobilisation, à la fin ce sont toujours les éternels vainqueurs qui l’emportent »…ce sont ces genres de phrases que l’on entend souvent.

Sur les 1.891.773 suffrages exprimés lors des législatives du 25 juillet 2013, l’Union pour la République (Unir) s’en était sorti avec 880 000 voix, avec 62 sièges acquis grâce au découpage électoral inique. L’électorat du parti au pouvoir semble figé, car le Rpt avait remporté la majorité aux législatives de 2007, avec 940 000 voix. Pour ce scrutin de 2013, toute l’opposition réunie rassemblait un peu plus d’un million de voix. De façon stricte, le Collectif « Sauvons le Togo » et la Coalition Arc-en-ciel réunissaient officiellement à eux deux un peu moins des suffrages du parti au pouvoir ; mais cela est dû aux annulations fantaisistes de voix de l’opposition dans plein de bureaux de vote et aux achats des consciences opérés par le pouvoir. La grande leçon est que si toute l’opposition reste soudée – c’est sans doute déjà compromis – et leurs électeurs reportent leurs voix sur le candidat le mieux placé, le sort du porte-flambeau du pouvoir – suivez les regards – serait scellé. C’est sans doute pour éviter ce risque que le régime refuse d’opérer les réformes et surtout d’adopter le mode de scrutin à deux tours. Si l’on transcende la déception causée par la désunion, si la mobilisation des électeurs reste importante, si la conscience des militants des autres partis des éternels loosers est au rendez-vous et ils votent utile (sic), l’opposition devrait l’emporter sans coup férir.

On le disait tantôt, ce sont généralement les électeurs de l’opposition qui boycottent les scrutins, par dépit et pessimisme, et qu’ils étaient un peu plus d’un million à choisir de ne pas voter en 2013. A considérer que ces acquis (sic) des législatives sont conservés par le pouvoir et l’opposition, il y a alors une masse d’environ 1,7 million d’électeurs – les 1 million de boycotteurs plus les 600 000 nouveaux électeurs attendus – à partager. Et si l’opposition arrive à mobiliser les populations à se rendre massivement aux urnes au cours de la prochaine élection présidentielle malgré les conditions, et ne serait-ce que 70 % de cette masse vote pour son candidat le mieux placé, l’alternance est alors encore possible. « Les Sénégalais l’ont vite compris. C’est seulement par la mobilisation massive des électeurs qu’ils ont pu avoir raison d’Abdoulaye Wade qui ne voulait pas partir (…) Malgré le refus des réformes, l’alternance est encore possible au Togo pour peu que les Togolais eux-mêmes individuellement prennent conscience de la situation et ne franchissent pas les frontières pour aller se mettre à l’abri et ne revenir qu’après le vote, à cause de la peur, un état de chose que le pouvoir exploite. Ce sont souvent des milliers de voix en moins pour l’opposition, et cela joue contre l’alternance », relève utilement un analyste.

Tino Kossi