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Mise en œuvre des réformes:Les propos de Faure Gnassingbé à Accra lui créent des ennuis auprès des partenaires

Togo - Politique

En visite de trois jours récemment à Accra au Ghana, Faure Gnassingbé a cru devoir aborder la question sensible des réformes constitutionnelles et institutionnelles. La Constitution sera rigoureusement respectée, a-t-il dardé, fermant ainsi (à son tour) la porte aux réformes. Il croyait ainsi se foutre de tout le monde. Mais ces propos, selon les indiscrétions, auraient beaucoup courroucé des partenaires et compliquent sa situation auprès de ces derniers.
La Constitution en vigueur sera respectée

« Tout ce que je peux vous dire, c’est que la Constitution en vigueur sera rigoureusement respectée ». C’étaient là ses déclarations à une question d’un journaliste sur les réformes réclamées par tout le monde au Togo. « Naturellement, l’opposition et les partis politiques peuvent avoir une opinion sur telle ou telle chose, mais ce vers quoi nous devons tous tendre, c’est la stabilité surtout, et le respect des dispositions constitutionnelles », a-t-il ajouté.

Ces propos traduisaient simplement les véritables intentions de Faure Gnassingbé, aphone sur la problématique des réformes depuis l’ouverture du débat : ne pas exécuter ces réformes recommandées par l’Apg et la Commission Vérité, Justice et Réconciliation de Mgr Nicodème Barrigah et profiter de la Constitution tripatouillée de 2002 qui a sauté le verrou de la limitation du mandat présidentiel pour briguer la magistrature suprême en 2015. Et sur sa candidature ou pas au scrutin de l’année prochaine, il a déclaré réserver la primeur à ses compatriotes.

Un casus belli, pour l’opposition

Casus belli, déclaration de guerre. C’est ainsi que ces propos un peu inconsidérés du Prince ont été conçus par certains acteurs politiques qui ont tenu à le signifier. A raison, d’autant plus que les réformes ne sont nullement une faveur de sa part, mais une obligation pour lui. C’était un engagement pris devant le peuple et la communauté internationale lors de la signature de l’Apg le 20 août 2006. Un accord qui avait donné une peinture de légitimité à son pouvoir acquis dans le sang en 2005, avec un millier de compatriotes tués.

Ces propos de Faure Gnassingbé ont même été dénoncés dans les rangs des acteurs de la société civile qui ont l’habitude d’être softs à son égard. Même au sein du pouvoir Rpt/Unir, on n’a pas trop cherché à justifier cette position qui parait un impair de l’homme sur une question aussi sensible que celle des réformes qui cristallise les passions. Même si son pouvoir est résolument dans cet état d’esprit, la preuve avec le rejet du projet introduit par le gouvernement le 30 juin dernier, l’impassibilité aux nombreux appels aux réformes, c’était une maladresse que de se permettre de pareilles déclarations. Et les téléspectateurs qui ont suivi les images sur la Télévision Togolaise ont vu un John Mahama visiblement gêné lors des déclarations de son invité. Il nous revient d’ailleurs que le président ghanéen, sachant le sujet sensible, avait tenté une première fois d’esquiver la question du journaliste, arguant que son hôte était au Ghana dans le cadre d’une visite de travail et que la question n’était pas la bienvenue. Mais Faure Gnassingbé lui-même y reviendra, sans aucune prudence. Et les dégâts sont là.

Les partenaires très courroucés

Faure Gnassingbé qui tire l’opposition du bout du nez sur cette question des réformes ne pensait pas susciter le courroux des partenaires du Togo. C’est pourtant ce qu’il a entrainé avec ces propos tenus à Accra. Dans les rangs des diplomates occidentaux accrédités au Togo et au sein de la communauté internationale, on est très remonté qu’il ferme la porte aux réformes qui sont un engagement que lui-même a pris depuis 2006.

« Ses déclarations font couler beaucoup de bile dans les rangs de la communauté internationale. On ne comprend pas qu’il refuse d’opérer les réformes indispensables à la transparence et à l’apaisement du scrutin de l’année prochaine, et certains partenaires lui ont remonté les bretelles (…) C’est la colère des partenaires qui a motivé la tentative d’explication ou de relativisation de ses propos entreprise par le service de communication de la présidence pour faire croire qu’il a été mal compris », nous confie une source qui est dans le secret des dieux. C’est le contraire qui aurait étonné, d’autant plus que c’est la communauté internationale qui avait pris le devant des choses pour amener l’opposition aux pourparlers qui ont abouti plus tard à la signature de l’Apg qui recommande ces réformes. Elle avait presqu’engagé sa dignité et lui avait servi de caution solidaire. Et c’est un manque d’égard à tout ce beau monde que de fermer la porte de ces réformes.

Il avait déjà maille à partir avec les partenaires, et ils haussent désormais le ton et lui demandent expressément de mettre en œuvre ces réformes avant la présidentielle de l’année prochaine. Faure Gnassingbé en aurait jusqu’au cou. Il nous revient qu’il s’est retranché depuis quelques jours dans la Kozah. Sans doute pour réfléchir et prendre la bonne décision pour sa vie.

Contraint aux réformes

Comment calmer les partenaires en courroux ? Telle est l’équation qui se pose désormais au Fils du Père. Car s’il a réussi à se jouer de l’opposition depuis 2006, il ne saurait se passer des partenaires du Togo. Même s’il réussit à passer en force en 2015 – ce qui est improbable-, il aura besoin d’eux pour l’accompagner. Et la seule façon de calmer tout ce beau monde en courroux qui a engagé sa respectabilité dans cette histoire d’Apg, c’est de se plier aux réformes. Et il ne saurait s’y dérober.

En tout cas, les partisans de l’alternance au pouvoir continuent d’exercer des pressions à cette fin. Après le Combat pour l’alternance politique en 2015 (Cap 2015) le 21 novembre et la Synergie des Organisations de défense des droits de l’Homme une semaine plus tard, l’opposition, les Oddh et la société civile ensemble vont battre encore le pavé vendredi prochain, pour réclamer les réformes. Parallèlement, il y a la proposition de loi des députés de l’opposition qui constitue un autre test à Faure Gnassingbé. Et il devra aussi faire avec la pression constante de François Hollande qui a déclaré son hostilité au 3e mandat et au pouvoir à vie en Afrique. Il est donc dans de beaux draps.

Tino Kossi