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Soutien des chefs traditionnels du Grand Ogou à Faure Gnassingbé : Une preuve de plus que UNIR est un parti qui cultive le tribalisme et l’ethnicisme, et clochardise les populations

Togo - Politique
Il y a longtemps qu’on a vu cela dans le pays mais l’événement ne doit pas surprendre quand on connaît la ligne politique du système qui régente le Togo depuis un demi-siècle. Des chefs traditionnels du Grand Ogou se sont cru obligés de parler au nom des populations et de proclamer leur soutien au chef de l’Etat en même temps qu’ils lui demandent d’être candidat à la présidentielle de 2015. Au-delà de la comédie, sans doute organisée par M. Aïdam pour abuser de la confiance de son patron Faure Gnassingbé ou pour le rassurer, il est évident que l’acte révèle de forts relents de tribalisme, d’ethnicisme, de clochardisation des populations. C’est à se demander si UNIR a besoin de ce cinéma avant d’imposer son candidat. Eternel d’ailleurs.

Comme au bon vieux temps
Le proverbe est sans équivoque : chassez le naturel, il revient au galop. A peine le débat sur les réformes, la limitation du nombre des mandats du président de la république, et surtout sur l’effet immédiat de ces réformes est-il lancé que dans le camp du pouvoir cinquantenaire, on est tombé en transe. On fait tout ce qu’on peut, on manifeste, on lit des déclarations et des motions de soutien. Le dimanche 30 novembre dernier, c’est à Atakpamé que le parti qui se confond impunément à l’Etat togolais a sorti sa nouvelle banderille, en date. On a ainsi vu dans une salle de conférence d’Atakpamé des chefs traditionnels dits du Grand Ogou proclamer leur soutien à Faure Gnassingbé.
« Nous chefs traditionnels, sages et leaders d’opinion issus des populations souche du Grand Ogou incluant les préfectures de l’Anié, de l’Est-Mono et de l’Ogou sommes réunis ce dimanche 30 novembre 2014 pour faire un tour d’horizon de la situation sociale, économique et politique qui prévaut dans notre pays durant cette dernière décennie…Eu égard à ce qui précède, nous, populations du Grand Ogou, toutes ethnies souche confondues, professons ce jour notre engagement total et inconditionnel à vos côtés » lit-on dans la déclaration présentée par les supposés ou autoproclamés chefs traditionnels, sages et leaders d’opinion, porte-parole des populations souche du Grand Ogou. Cet extrait fait tiquer sans doute et on se serait cru en 1990 ou en 2000-2002 lorsque feu Eyadèma occupait ses journées à écouter les plaisantins qui défilaient dans sa maison de Lomé 2.
Pourtant, c’est en 2014 que cela se passe et sous le règne de Faure Gnassingbé, celui qui n’a de cesse de parler de rupture et de modernité, celui-là même qui avait déclaré péremptoirement que « lui c’est lui, moi c’est moi », pour faire croire que rien ne sera plus comme avant. La présence de M. Georges Aïdam ;1er vice-président UNIR, est une preuve irréfutable que de telles déclarations ne sont que des proclamations destinées à abuser de la confiance des Togolais et de la communauté internationale. M. Aïdam a répondu aux chefs traditionnels, sages et leaders d’opinion ; sa réponse témoigne de la logique qui sous-tend la démarche et elle a le mérite d’enseigner que le débat sur la limitation du nombre des mandats du président de la république dérange des gens dans ce pays.
M. Aïdam aurait déclaré : « cette décision que vous avez prise de lui dire d’être candidat, je vous soutiens dans la prise de cette décision ». Rien d’étonnant ni d’exceptionnel. La suite est plus intéressante. Selon M. Aïdam, « nous ne pouvons pas admettre que ce soit quelqu’un d’autre qui vienne nous dire celui qui va être le candidat de notre parti » et aussi « chacun n’a qu’à s’occuper des affaires de son parti ; nous, nous avons déjà notre seul et unique candidat et nous le connaissons déjà ». Tout est dit : la démarche vise à faire croire que ce sont les populations qui réclament la candidature de Faure Gnassingbé.

Aberrant et condamnable
A la réunion de laquelle est sortie la déclaration attribuée aux chefs traditionnels, sages et leaders d’opinion du Grand Ogou, on notait la présence de députés du parti de Faure Gnassingbé, du préfet de l’Ogou, l’un des missi dominici et exécutant des basses besognes au profit du fils d’Eyadèma, sans oublier entre autres celle des responsables de ce qu’on appelle le Mouvement d’appui au parti UNIR du Grand Ogou (MAPUGO). Cela signifie que c’est une démarche purement partisane puisque, jusqu’à preuve du contraire, UNIR n’est pas le seul parti à avoir fait élire des députés dans le Grand Ogou. De ce fait, c’est une arnaque et une supercherie que de prétendre parler au nom des populations des préfectures d’Anié, de l’Est-Mono ou de l’Ogou.
C’est dans ce sens qu’il faut comprendre la réaction des militants de l’Alliance nationale pour le changement (ANC). Dans une déclaration rendue publique le dimanche 30 novembre, ils ont dénoncé l’attitude de leurs « frères » du parti UNIR, soulignant que la réunion est « une manœuvre du préfet de l’Ogou et du 1er vice-président du parti UNIR » avec l’objectif de « faire croire à Faure Gnassingbé que le Grand Ogou est derrière lui ». Mieux, on apprend dans cette déclaration que « les personnes signataires de cette déclaration ont été convoquées manu militari et contre leur propre volonté ».
Dans l’hypothèse où les positions exprimées par les militants de l’ANC relèvent du vrai et du pertiennt, il est impérieux de faire souligner que ce ne serait point du nouveau sur la terre de nos aïeux. Hier comme aujourd’hui, on fait parler au nom des populations des aventuriers et des opportunistes, des chefs traditionnels sans personnalité ni volonté sans que cela soit l’expression d’une volonté véritablement populaire. Si c’était le cas, font généralement observer les spécialistes de la politique togolaise, le RPT hier, UNIR aujourd’hui, n’aurait pas besoin de verrouiller le cadre électoral et de caporaliser l’administration avant de conserver le pouvoir. C’est un autre débat.

Apologie du tribalisme, de l’ethnicisme
Ce qui est arrivé le dimanche 30 novembre à Atakpamé permet de dire que le pouvoir UNIR est pris en flagrant délit d’apologie de l’ethnicisme et du tribalisme. Les participants à la rencontre parlent étrangement de « populations souche ». Que mettent-ils dans cette formule ? Du coup, il s’agit d’un double crime de tribalisme et d’ethnicisme car en plus de forcer les populations du Grand Ogou à parler en leur nom, comme s’ils n’étaient pas des Togolais devant penser à la nation Togo, on les encourage à faire la différence, malheureuse, entre des populations dites souche et d’autres qui seraient d’origine douteuse.
Dans la réalité, le système RPT devenu UNIR n’a jamais fait autre chose. Le pouvoir de feu Eyadèma avait une base fondamentalement ethnique et tribale tant et si bien que les discours sur l’unité nationale et la concorde n’étaient que de la propagande destinée à tromper les apparences. Derrière de discours, il y avait une tendance purement tribale qui voulait que des discours du genre « si je quitte le pouvoir, si le RPT perd le pouvoir, vous serez maltraités, brimés et chassés de ce pays » adressés aux compatriotes de la Kara et d’ailleurs. Plus tard, cette logique s’est renforcée avec une virée vers le resserrement ethnique et tribal autour de Pya. Non seulement l’armée n’a pas pu se défaire de son caractère tribal, un grand nombre de soldats étant originaires de la ville et du village ou de l’ethnie du président, les principaux postes de responsabilité dans l’armée étant également occupés par des compatriotes affichant ses caractéristiques, sans oublier le malheureux équilibre régional qui veut qu’un responsable du Nord soit secondé par un autre du Sud, ainsi de suite…Faure Gnassingbé n’y a pas changé grand-chose.
La rencontre d’Atakpamé ne peut être vue et lue que sous cet angle. Il faut même envisager très bientôt d’autres rencontres du genre dans différentes régions et villes du pays. C’est comme cela que Faure Gnassingbé unit les Togolais à travers son parti UNIR. Pourvu qu’on ne serve pas aux Togolais la scène des aveugles n’ayant pas vu des cadavres sur les plages de Lomé.

Nima Zara