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FOCUS SUR L’ARMÉE

Togo - Politique
. « Il faut donc être renard pour connaitre les pièges, et lion pour effrayer les loups » (Machiavel)
La provocation des « civils »

« L’’institution de nos armées est telle qu’elles tuent chez tout individu qui y entre toute conscience nationale et patriotique ainsi que toute conscience éthique du bienêtre social collectif, de justice sociale, de compassion voire d’empathie ? »

En posant cette question à Emmanuel Boccovi qui parle d’armée coloniale dans un article intitulé « CDPA-BT, Retour sur le Burkina », le Vice Président du Parti des Togolais pose un problème qui va au-delà des seuls mouvements sociaux et de leur gestion. Frédéric Atsou Galley entrevoit l’après révolution comme une menace même contre les acquis immédiats de la révolution et d’emblée comme l’entrée dans une relation oscillatoire si les étiquetages prennent le pas sur les mérites bien sûr. Avant même que nous posions ici ensemble la problématique de l’armée, je voudrais reconnaitre à Emmanuel Boccovi une vision politique responsable ; qui sait pré-venir: « Mais si –et on peut le craindre– les organisations politiques d’opposition se sont laissées surprendre par l’ampleur du mouvement populaire et n’ont pas une alternative politique claire à offrir par conséquent, alors la révolution burkinabè court un grand risque de devenir une foire d’empoigne dominée par des voix discordantes, celle des chefs de l’armée, celle des organisations politiques ; celle de la pléthore d’organisations de la société dite civile, celle des jeunes, celle des femmes… Une foire d’empoigne où la transition, qu’elle soit conduite demain par un militaire ou un civile, risque bien de déboucher sur une restauration ouverte ou insidieuse du régime néocolonial. »

Reste donc à savoir comment organiser les transitions et avant cela, comment achever la révolution ou les révolutions tout en faisant l’économie de l’armée. Devons nous, nous rabattre sur ce qu’avait conclu Agbota Zinsou dans un billet récent ? «Contente le peuple, seul souverain. Et le soldat fait partie du peuple, comme l’ouvrier, la revendeuse du marché, l’employé de bureau, le cadre…tous soumis aux lois de la République, tous égaux devant la Loi »

De la composition des armées africaines.

Les armées africaines sont, pour la plupart, à composition ethnico clanique, on le sait. Les raisons sont soient historiques soient stratégiques et dans bien des cas les deux. Au Togo le métier des armes était perçu dans certaines régions comme.une incivilité et un travail de mercenaires. Me Jean Dégli témoigne dans Togo : à quand l’alternance politique de cette philosophie : ahouevi me kplona gni o : l’enfant du terroir ne se fait pas bouvier. Mais aujourd’hui, si cette historicité explique un fait sociologique, elle ne dédouane pas d’une recomposition de l’armée. Une armée républicaine doit être pluriethnique dans son essence ; dans sa conception même. Pour autant on ne peut forcer des gens d’autres ethnies de se faire enrôler pour faire le nombre. De la même manière, on ne peut demander aux concitoyens de démissionner pour équilibrer le dosage. Cela relèverait plutôt d’un jeu que d’une politique. A mon avis, le caractère républicain de l’armée et plus précisément de l’armée togolaise doit se lire, en premier, dans l’idée que l’on se fait de l’armée. Aussi bien chez le militaire que chez le civil qui doit cesser comme le dit Zinsou de percevoir l’homme en treillis comme un privilégié. C’est à dire que celui qui rentre dans l’armée ne doit pas avoir en tête d’y aller pour se donner je ne sais quel pouvoir, Le service militaire n’est pas une fabrique à couillons non plus ; quand bien même l’on essaie de réduire le soldat de rang à une sorte d’abruti, d’ilote consentant qui donne procuration à son chef de réfléchir à sa place. Les statuts de l’armée doivent être revus et la rigidité hiérarchique assouplie En réalité nous avons affaire à une inculture à ce niveau. Il convient de poser des garde-fous pour résorber cette tendance d’animalisation. A titre indicatif, on pourra penser à une formation militaire théorique en alternance avec le social ; l’éducation civique à l’orée du diplôme minimum requis par le recruteur, les séances de Bal des militaires comme cela se fait tous les ans en Europe (le Bal des pompiers) pour un brassage civique etc.
L’ethnicisation de l’armée et, au-delà, de tout l’espace publique est intervenue plus tard lorsque les Chefs d’États impopulaires y ont trouvé le sésame pour leur maintien au pouvoir. La dimension sociologique et historique de la composition de l’armée n’est pas la cause de la dictature ; il faut bien le noter Elle n’est que la conséquence d’un désir de s’éterniser au pouvoir en s’appropriant un instrument de contrainte et de monopole de la violence .C’est pourquoi le militaire lambda n’est pas responsable de la structuration de l’armée. Je dirai un peu vulgairement que c’est un chromeur qui a cherché et trouvé du job. Point n’est besoin d’en faire tout un foin. L’ancien Président Abdou Diouf nous dit son expérience lorsqu’un de ses pairs lui donne ce qu’il pensait être la clé du pouvoir : « Abdou, voilà ce que tu dois faire : créer une garde présidentielle composée exclusivement de gens de ta tribu." Je [Diouf] lui ai répondu ainsi : "D'abord, je n'ai pas de tribu. Ensuite, il existe déjà une garde. Enfin, la plupart de ceux qui me servent au palais de la République sont des Casamançais [originaires d'une région alors secouée par une rébellion irrédentiste], en qui j'ai entière confiance » (l’Express)

De la Contribution de l’armée.

Cet espace ne me permet pas d’être long. Mais je voudrais souligner tout de suite et les récuser ipso facto toutes les généralités mille fois ressassées sur le militaire supposé cantonné dans son camp de merde, à broyer du noir tandis que les « civils » très civilisés obtiennent le droit de se répandre dans les rues à violer et violenter, à piailler et à piller, à casser et à massacrer…Et si l’armée n’intervient pas (souvent la police est débordée) les mêmes qui enferment l’armée dans les casernes s’offusquent de la passivité de celle-ci, prétendument complice de la dégradation des biens publics et privés. L’on demande dans des tribunes au vitriol, toute honte bue, la démission du chef d’état major, du ministre de la défense.

Prenons le cas du Burkina sur lequel nos analystes nous ont offert un nœud de contradiction. La rue a chassé Blaise Compaoré… Et puis… quoi ? La rue va s’installer au palais ? La rue va présider la rue ? La rue va donner l’ordre à l’armée de sortir enfin pour mater les pilleurs et les violeurs eux même dans la rue ? Veut-on des autodafés ? Quand les mouvements sociaux se transforment en vagues insurrectionnelles, ils emportent tout sur son chemin. Il faut nécessairement l’intervention de l’armée pour rétablir l’ordre. Dans bien des cas, les apparatchiks du pouvoir qui font la pluie et le beau temps dans l’armée aux heures heureuses des dictatures prennent la poudre d’escampette quand la masse populaire s’affirme. On l’a vu partout dans le monde. La mauvaise presse dont bénéficie l’armée togolaise n’est quand même pas usurpée. Nous connûmes nos militaires « gourdineurs », voleurs d’urnes, pilleurs à ses heures libres et qui vous regardent avec un regard méchant, avec des yeux sales !

Résumons-nous

Disons en bref que l’armée est une institution et en tant que telle, il faut la respecter. Le rosier pique, mais nous aimons bien les roses ! Ce n’est pas parce qu’un couteau a tué qu’il faille supprimer tous les couteaux du monde ! Il faut arrêter l’amalgame entre le militaire, l’armée et le régime militaire. Un civil peut être parfaitement à la tête d’un régime militaire- nous l’observons bien au Togo- ; comme un militaire peut diriger un gouvernement civil. Il y a bien dans l’armée des médecins, des informaticiens, des juristes, des économistes, des mécaniciens et que sais-je encore ! Le militaire n’est pas un cancre conditionné aux ordres du premier quidam, parce qu’il se dit civil. Au 3G, nous disons que la démocratie c’est aussi le respect scrupuleux de nos institutions, de toutes nos institutions, le respect de nos textes de loi et au dessus de tout, le respect, à l’esprit et à la lettre, de notre texte fondamental qu’on nomme Constitution.et que les togolais ont plébiscité en 92.
NON ! « L’’institution de nos armées [n’est pas] telle qu’elles tuent chez tout individu qui y entre toute conscience nationale et patriotique ainsi que toute conscience éthique du bienêtre social collectif, de justice sociale, de compassion voire d’empathie ? ». Mais évidemment « Lorsqu’elles sont mal formées, sous-équipées, mal gérées et irrégulièrement payées, les forces de sécurité contribuent souvent à l’insécurité en se rendant coupables de graves violations des droits de l’homme. (M. Ban Ki-Moon, Secrétaire général de l’ONU)