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Faure Gnassingbé, les 3 engagements et les responsabilités d’homme d’Etat

Togo - Societe
Le président bien-aimé ne sait peut-être pas que les grands hommes sont ceux qui tiennent leurs promesses et respectent leurs engagements. Autrement, il y a longtemps qu’il aurait fait donner une suite logique et pertinente au débat sur les réformes qui sont devenues comme une aiguille qu’on cherche dans du foin, ou tout simplement comme le vaccin anti Ebola. Quoi qu’on dise, le problème reste entier et celui qui y perd honneur et respectabilité, c’est bien Faure Gnassingbé. Et lui seul.
Devoir de mémoire sur les 3 engagements
Dès qu’on parle de 3 engagements, on excite la curiosité et le souvenir de bien de personnes. On sait que feu Eyadèma avait été contraint à prendre 22 engagements à Bruxelles dans l’espoir d’améliorer les relations entre l’Europe et le pouvoir très contesté du défunt potentat. Mais ce n’est pas seulement feu le président Eyadèma qui a pris des engagements, son fils, héritier biologique et politique, en a aussi les siens. Il s’agit d’un engagement oral et de deux autres écrits pris à diverses dates, devant le peuple togolais et souvent sous le contrôle des partenaires en développement.
L’engagement oral, c’est celui que Faure Gnassingbé a pris en public en avril 2007 à Atakpamé. Après les tragiques affrontements entre militants et sympathisants des chapelles politiques en 2005, Faure Gnassingbé a trouvé pertinent d’aller déclarer à Atakpamé, l’une des villes les plus meurtries par les malheureux événements de 2005, que de telles choses ne se produiront plus dans le pays. C’est la célèbre formule du « plus jamais ça » qui a fait couler d’encre et de salive ici et ailleurs. Faure Gnassingbé se souvient-il encore de cette formule ? Même si c’était fait juste à des fins de propagande politique, l’opinion nationale n’oublie pas que le chef de l’Etat togolais a pris un tel engagement devant le peuple togolais et devant l’histoire.
Le second engagement est écrit ; il remonte à 2006 et l’évocation de cette année fait penser naturellement à la signature de l’Accord Politique Global (APG). Accord de l’espoir et du rêve, l’APG n’est pas allé plus loin que le gouvernement d’union nationale dirigé par Me Agboyibo. Pour le reste de ce qui y est essentiel, Faure Gnassingbé et les siens ont joué au cache-cache avec tout le monde. Cela dure depuis 8 années et tout se passe comme si Faure Gnassingbé avait un problème avec les promesses.
Quid du troisième engagement ? Ecrit comme le précédent, cet engagement correspond à ce qui est écrit dans le rapport d’activités de la Commission Vérité Justice et Réconciliation (CVJR). Les milliards de F CFA engloutis dans les travaux de cette commission n’ont visiblement servi à rien. Bien que le rapport ait nettement et clairement indiqué au chapitre de ces recommandations la nécessité des réformes politiques si tant est qu’on veut réconcilier les Togolais. Curieusement, en dépit du fait que Faure Gnassingbé ait installé de bon cœur la commission et qu’il ait reçu des mains de son président le rapport incluant les recommandations, ce que la CVJR a demandé de faire pour un Togo uni et solidaire est abandonné et rangé dans les tiroirs.
Le comble, on a laissé les députés rejeter un projet de loi portant réformes politiques, sans se soucier de la parole donnée et des engagements pris devant témoins.

Rappels et exhortations
Il se sent de plus en plus que Faure Gnassingbé a choisi de fermer les yeux sur ses engagements. Du coup, des partenaires en développement et des acteurs de la société civile nationale se sont donné le pensum de lui rappeler qu’il ne doit pas jouer les amnésiques.
L’acte le plus récent dans ce sens est le communiqué de ce qu’on appelle le Groupe des 5. Les ambassadeurs de l’Union Européenne, de France, des Etats-Unis, d’Allemagne ainsi que la représentante-résidente du PNUD ont ainsi publié un communiqué pour exprimer leur adhésion et apporter leur caution à l’appel patriotique des responsables des églises catholique, presbytérienne et méthodiste. « Les chefs de mission de l’Union Européenne, de la France, de la République Fédérale d’Allemagne, des Etats-Unis d’Amérique ainsi que la coordinatrice résidente du système des Nations Unies accrédités au Togo s’associent à l’appel récent des Eglises du Togo en faveur d’une issue positive du processus de réformes constitutionnelles, encore inachevées » lit-on dans leur déclaration rendue publique. Bien que laconique, cette déclaration a le mérite de souligner l’intérêt de ces partenaires en développement pour une finalisation des réformes politiques mises au réfrigérateur par Faure Gnassingbé et les siens.
La sortie des ambassadeurs fait référence à celle des premiers responsables des églises catholique, presbytérienne et méthodiste du Togo. Dans une déclaration officielle adressée aux acteurs politiques, les « hommes de Dieu » ont trouvé juste et opportun d’en appeler au bon sens de Faure Gnassingbé et de ses adversaires politiques en vue d’un sursaut patriotique qui mettrait le pays à l’abri de développements tragiques. Ces religieux exhortaient les acteurs politiques à tout faire dans le sens d’une « nouvelle initiative visant à réexaminer les questions introduites auprès de l’organe législatif de notre pays en vue d’y trouver une issue plus positive ». Dans cette logique, ils ont attiré l’attention de ces acteurs sur l’importance de cette nouvelle initiative puisqu’elle peut « permettre à l’élection présidentielle de 2015 de se tenir dans un cadre serein, paisible, juste et équitable ».
La même exhortation était contenue dans les conclusions du dernier dialogue UE-Togo tenue récemment à Lomé. Au cours de ces discussions, il nous est revenu que l’ambassadeur de l’Union européenne a insisté sur l’intérêt de l’introduction d’un nouveau texte constitutionnel qui consacrerait les réformes attendues depuis des années. Faure Gnassingbé va-t-il rester insensible à toutes ces exhortations qui pourtant ne font que lui rappeler les engagements qu’il a librement pris ?

Mériter le respect
Une sagesse du Togo enseigne qu’on ne se cache pas après avoir dit oui. Les engagements que Faure Gnassingbé a pris devant témoins, l’heure est venue pour qu’il les tienne. Selon différents observateurs, le chef de l’Etat togolais a considérablement rogné sa respectabilité et son honneur en choisissant de se cacher derrière un mur de verre.
Pour ces observateurs, il est incompréhensible que Faure Gnassingbé se cache derrière Gilbert Bawara, Aboudou Assouma ou « ses » députés à l’Assemblée Nationale pour espérer échapper aux engagements pris. En 2006, indique-t-on, il n’a pas eu besoin des députés avant de faire signer l’APG ; de la même manière, les recommandations de la CVJR n’ont pas été validées ou générées par les députés, c’est en toute sérénité qu’il a installé la commission et reçu le rapport final. Pourquoi donc joue-t-il aujourd’hui au jeu de cache-cache quand l’heure est arrivée de passer aux choses sérieuses, c’est-à-dire de mettre en œuvre les contenus des engagements ? Nulle part dans le monde, les accords politiques ne sont dénoncés par une Assemblée Nationale ; pour ce qu’il est, un accord politique est mis en œuvre par des mesures strictement politiques. En conséquence, Faure Gnassingbé doit admettre de regarder la réalité en face et ainsi assumer l’histoire. Si tant est qu’il a promis à Atakpamé qu’il n’y aura plus de tragédie liée aux élections au Togo, quelle garantie peut-on avoir que des élections organisées dans le désaccord et dans la confusion sont susceptibles de réaliser sa promesse ?

Faure Gnassingbé ‘est-il pas en train de réclamer du silence en même moment où lui-même bat le tambour ? Aujourd’hui et demain, tout ce qui adviendra dans le pays lui sera imputé car il se rend coupable du délit de promesses non tenues, d’engagements non respectés et surtout de légèreté dans les affaires publiques. Pour échapper à cette lourde responsabilité devant l’histoire, il lui faut faire le bon choix : se départir des intérêts égoïstes et partisans pour remettre sur le métier l’ouvrage des réformes politiques. Les grands hommes sont ceux qui tiennent parole et respectent leurs engagements. La répétition n’est pas inutile. Les Togolais et les partenaires en développement attendent.

Nima Zara