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Dialogue Togolais : vers la grande désillusion

 Il faut de longues années avant que les valeurs s'appuyant sur la vérité et l'authenticité morales s'imposent et l'emportent sur le cynisme politique; mais à la fin, elles sortent toujours victorieuses.
Vaclac Havel

Le dialogue, ouvert il y a environ 3 semaines avec des hommes et femmes qui, il y a quelques mois s'observaient en chiens de faïence et qui ont fini par se retrouver pour débattre sereinement de la dramatique situation du pays avait suscité de grands espoirs au sein d'une population qui poursuit en silence son chemin de croix. Mais, force est de constater qu' à l'hôtel du 2 février, les choses n'évoluent pas du tout comme cela se doit..Bien sur que nous ne sommes pas si naïfs pour croire que tout se déroulera sans obstacles ni difficultés mais quand on analyse les demi-resultats et ce, à quelques jours de la clôture des travaux, on a tendance à dire plutôt que cela ressemble fort à cette espèce de filtre passe-bande comme dirait le physicien, qui ne laisse que certaines longueurs d'onde. Il y a des questions qui passent et d'autres pas juste parce que ne faisant pas bon ménage avec les humeurs de l'oligarchie militaro-fasciste au pouvoir. Ainsi, le dialogue est entrain de virer, de façon suicidaire à une sujétion occultant tragiquement les questions les plus fondamentales énoncées à l'ordre du jour à savoir les problèmes de l'insécurité et la reforme de l'armée, la lutte contre l'impunité, le problème de réfugiés.Le Rpt et ses associés sont demeurés fidèles à leur stratégie, qui consiste depuis toujours à imposer les termes et les limites du débat. En clair, le régime ne cherche qu'à céder sur certains points mineurs afin d'aller rapidement aux élections législatives pour espérer la reprise de la coopération avec l'UE. C'est l'objectif que visent visiblement la France et Louis Michel. Tout ce que ces fossoyeurs veulent est un décor démocratique avec des institutions et des hommes politiques factices afin de donner une certaine légitimité à un pouvoir qui en a grandement besoin. Une sorte d'adaptation artificielle aux changements palpables ailleurs et ce, par un simple changement d'oripeaux. C'est ce que nous appelons la « démocratie sélective et conditionnelle » à la togolaise et avec comme parrain Louis Michel. Apparemment inoffensif mais fin calculateur et grand adepte de la langue de bois et de la méthode Coué donc personnage difficile à cerner, Louis Michel n'est rien d'autre que la caution morale et politique et use de sa position dans l'échiquier politique internationale et de sa position à la commission européenne pour pérenniser le pouvoir clanique et ce, avec la bénédiction de la France. L'« édifice » artificiel, préfabriqué, qu'on assemble laborieusement ne tiendra pas et s'effondrera comme un château de cartes pour la simple et modeste raison que les fondements sur lesquels reposent les solutions imposées par ceux qui ont pris le peuple en otage sont erronés. Une crise éminemment politique ne pouvait être réglée par une simple organisation d'élections législatives. Les élections tant recherchées peuvent avoir lieu aujourd'hui ou demain, mais au lieu de résoudre le problème de légitimité, de déboucher sur une paix durable et une réconciliation véritable et donc mettre fin à la crise togolaise ne feront que l'aggraver si elles ne sont pas préalablement bien préparées et précédées d'un consensus politique national nécessaire, notamment en résolvant au préalable tous les problèmes et contentieux. Cet entêtement et cet attachement névrotique au pouvoir ne font que courir de graves dangers à toute la nation. Finalement, tout ce qu'on a clamé haut et fort ces derniers jours comme ouverture et bonne volonté du pouvoir pour une quelconque réconciliation nationale ne sont rien d'autre que de la rhétorique propagandiste, des artifices, une suite de fumisteries et de supercheries pour donner à l'opinion internationale, une image en trompe-l'oil du Togo avec un pouvoir recherchant en fait désespérément sa légitimité à l'extérieur faute de l'avoir dans son propre pays. Et la communauté internationale, à son tour, se suffirait de cette supercherie pour apaiser sa mauvaise conscience. Louis Michel nous prouve encore une fois que nous ne devons pas nous leurrer au sujet de la bonne conscience de l'Occident et de son « aide » dans la résolution de la crise. Et nous continuerons avec notre habituelle « naïveté » à nous interroger s'il existe des atteintes à la démocratie et aux droits de l'homme qui offensent la conscience occidentale et d'autres pas? Avec ce Monsieur, les occidentaux démontrent une fois encore qu'ils ont une vision élastique de ces principes et valeurs universelles. Démocratie et droits de l'homme en deçà et intérêts au-delà. C'est leur conception de la politique et c'est de bonne guerre. Et tant qu'à leurs yeux la valeur des matières premières est supérieure à celle de la dignité humaine, tant que les comptoirs néo-coloniaux pourront fonctionner à plein régime avec la complicité d'une oligarchie rentière, nous ne devons rien attendre de leur coté. La décomposition de la société togolaise, la déliquescence du système et les atteintes gravissimes aux droits de l'homme ne sont nullement des écueils pour Louis Michel. Nous n'en faisons pas un drame mais ayons au moins la lucidité et l'honnêteté d'en tirer les leçons. Et le drame que nous vivons nous en donne énormément!
Dans un contexte certes encore plein d'incertitudes et battu par des vents contraires, de minuscules pas ont été faits de part et d'autre, mais il convient de les conforter au cours de ce dialogue pour ancrer dans notre vie politique une réelle politique démocratique. C'est possible, nécessaire et indispensable. Pour cela, il nous faudra un même langage, un certain nombre de valeurs fondamentales partagées à savoir la culture de l'honnêteté, de la bonne foi, d'ouverture d'esprit et la volonté de parvenir à un compromis durable. La politique n'est pas la science des certitudes; elle n'est pas non plus une science de l'à peu près. Nous appartenons à cette majorité silencieuse qui refuse les fausses solutions et encore moins, les honteuses compromissions. Devant la gravité de la situation, nous devons faire preuve d'honnêteté envers notre peuple longtemps traîné dans la boue. Alors, Mesdames, Messieurs, ne soyez pas aveugles à l'avenir que vous dessinez.

Canada, le 11 mai 2006
Didier Noudoda