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Bientôt un vaccin face au cancer du col de l’utérus

CHRONIQUE - Santé, sexualité
 En France, le cancer du col de l’utérus est responsable chaque année d’un millier de décès. Cette maladie se développe à partir de lésions dites précancéreuses provoquées par certains virus. Pour la première fois, un vaccin offre une protection sur le long terme contre les plus nocifs de ces intrus.

Développé par Merck et Sanofi-Pasteur-MSD, un vaccin expérimental vient de confirmer son efficacité contre le cancer du col de l’utérus. Face à cette maladie qui touche 500 000 femmes chaque année dans le monde, ces résultats représentent un véritable espoir.

La chasse aux papillomavirus

Différents types de virus, de la famille des papillomavirus humains (PVH), sont à l’origine du cancer du col de l’utérus. Aujourd’hui, le frottis cervical (test de PAP) permet de dépister ces infections sexuellement transmissibles qui dans la plupart des cas restent latentes ou sont bénignes. Mais ces infections peuvent également évoluer en lésions précancéreuses, puis si elles ne sont pas traitées, en cancer du col de l’utérus. On dénombre ainsi chaque année 258 000 décès dans le monde, dont 1 000 en France. Les papillomavirus présents dans 80 % des cas n’ont pas tous le même pouvoir cancérigène. Le plus nocif est sans conteste celui de type 16 (HPV-16), impliqué dans 50 à 60 % des cancers du col1. Vient en seconde position, le HPV-18 qui serait responsable de 10 % des cancers du col2. A contrario, le risque de cancer chez les femmes non infectées est quasi-nul.

Seul bémol de la stratégie de dépistage par frottis, elle implique un très grand nombre d’examens qui ne bénéficient qu’à une minorité. En effet, un maximum de 3 % des femmes porteuses de papillomavirus développera un cancer. Ainsi la mise au point d’un vaccin efficace pourrait demain déboucher sur une autre stratégie de prévention.

Une protection à 100 %

Le 6 octobre 2005, les laboratoires Merck et Sanofi Pasteur MSD annonce qu’un vaccin était efficace à 100 % contre les formes les plus communes de ce cancer3. Ce vaccin baptisé Gardasil™ protège des papillomavirus humain de types 6, 11, 16 et 18 (les HPV 6 et 11 sont responsables de 90 % des condylomes acuminés, infections sexuellement transmissibles plus connues sous le nom de crêtes de coq). Pour mesurer l’efficacité de ce vaccin, une étude a été réalisée sur plus de 12 000 femmes âgées de 16 à 26 ans (vivant 13 pays différents) qui n’étaient pas infectées par le virus. La moitié a reçu trois doses de Gardasil™ et l’autre moitié un placebo (médicament inactif). Après 17 mois de suivi, le premier groupe ne présentait aucune lésion pré-cancéreuse tandis qu’on en dénombrait 21 dans le second groupe. "Il s’agit de données fondamentales, qui démontrent que la vaccination avec Gardasil™ permet de prévenir les lésions précancéreuses et les cancers non invasifs du col de l’utérus dus à HPV 16 et 18" a déclaré Laura Koutsky, principal investigateur du groupe de recherche sur le HPV à l’Université Washington, à Seattle.

Aucune vaccination n’a dû être interrompue à cause d’effets secondaires du vaccin. Même si les effets indésirables étaient plus fréquents chez les femmes qui ont reçu Gardasil™ que chez celles qui avaient reçu le placebo, il s’agissait la plupart du temps d’une légère gêne au point d’injection. Ces résultats confirment ainsi de précédentes études conduites sur un plus faible nombre de femmes4,5.

Vers un nouveau vaccin anti-cancer

Tout comme le vaccin contre l’hépatite B prévient indirectement le cancer du foie, ce nouveau vaccin pourrait être le second vaccin anti-cancer mis sur le marché. Merck prévoit de déposer une demande d’enregistrement auprès des autorités américaines, la Food and Drug Administration, au cours du dernier trimestre 2005. Sanofi Pasteur MSD déposera juste après une demande d’autorisation de mise sur le marché auprès de l’Agence européenne du médicament (EMEA). Même si aujourd’hui, Merck et Sanofi-Pasteur-MSD semblent disposer d’une bonne avance, d’autres laboratoires travaillent à la mise au point d’un tel vaccin. Ainsi, Glaxosmithkline publiait en 2004 des résultats encourageants d’un autre vaccin expérimental contre les HPV-16 et 186.

Avant de disposer d’un tel vaccin anti-cancer, quelques points devront cependant être éclaircis. A qui le réserver ? A priori, il s’adresserait en priorité aux jeunes adolescentes, avant le début de leur vie sexuelle. Les adolescents pourraient également être sollicités, car bien que ne souffrant pas directement de cette infection, ils servent souvent de « réservoir » et peuvent la transmettre. Ce vaccin nécessitera-t-il des rappels ? Les études reposent sur un vaccin administré en trois doses sur une période de six mois. Même si son efficacité reste très élevée, elle semble légèrement diminuer avec le temps. De plus amples recherches devront étudier l’utilité d’un éventuel rappel. Autre sujet de préoccupation : avec près de 250 000 décès par an, les pays en voie de développement pourront-ils s’offrir ce vaccin ?

Enfin, malgré une efficacité étonnante, ce vaccin ne va pas faire disparaître le cancer du col de l’utérus mais en diminuer le nombre de cas (d’autres papillomavirus peuvent être à l’origine de ce cancer). Dès maintenant, la lutte contre le cancer du col de l’utérus repose donc sur un dépistage régulier par frottis cervical et par la lutte contre les autres facteurs de risques connus : les infections sexuellement transmissibles et le tabagisme.

David Bême

1 - J Natl Cancer Inst. 1995 Jun 7;87(11):796-802.
2 - NEJM 2003 ;348 :518-27
3 - Communiqué de Merck, Sanofi-Pasteur-MSD, Présentations lors du congrès IDSA 2005
4 - NEJM, November 21, 2002, Number 21, Volume 347:1645-1651
5 - Prophylactic Human Papillomavirus (HPV) 16 virus-like particle vaccine prevents HPV -16-Related Cervical Intraepithelial Neoplasia (CIN)2- 3, C Mao et all. - Abstract G-1675a –présenté le 1er novembre 2004 au congrès ICAAC 2004
6 - Lancet 2004 ;364 :1757-65