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Le Paradoxe togolais : Une croissance économique de 6% en 2012 mais LE TOGOLAIS VIVOTE TOUJOURS

Togo - Societe
Où va au juste la richesse créée ensemble ?
Avec ses six (6) millions d’habitants, le Togo sur l’échiquier mondial fait partie des pays qu’on pourrait qualifier de « pays revenant ». Hier appelé la Suisse de l’Afrique, cette portion de territoire étirée entre l’ancienne Gold Cost et le Benin vient à peine de renouer avec le réseau économique mondial après plus de deux(2) décennies d’asphyxie économico-financière pour insuffisance démocratique. Avec ce retour, le pays de Faure Gnassingbé s’est alors engagé dans un vaste programme de relance économique avec une forte campagne d’assainissement des finances. Six (6) ans après, les résultats commencent à être brandis : une croissance de 6 % pour 2012 (après 3% en 2010 et 5% en 2011). Dans la foulée une vaste politique sociale est lancée : exécution d’une politique nationale de promotion de l’emploi des jeunes, mise en place des transports en commun intra-urbain pour la capitale Lomé, relèvement du Smig de 13 000 à 28 000 puis à 35 000 fcfa, assurance maladie pour tous les agents de la fonction publique para publique et assimilés etc…Malgré ce fichier socio-économique appréciable, la réalité dans le quotidien du citoyen togolais tend à illustrer le contraire. Le clicher social affiche toujours la survivance au jour le jour, des ressentiments sur toutes les lèvres, avec une forte frange de la population qui ne voit pas réellement les retombés de cette croissance économique déclarée, ni les incidences probantes de ces bouées sociaux dans leur quotidien.

Depuis trois (3) mois, la fonction publique togolaise est secouée par des grèves répétées suite à la promesse d’amélioration conséquente des conditions de traitement des agents de la fonction publique non encore tenue par le gouvernement, malgré l’adoption express du statut général régissant ce secteur fin janvier dernier. Les 10,11 et 12 Avril prochain la fonction publique sera encore paralysée pour non satisfaction des réclamations des travailleurs regroupés au sein de la Stt (Synergie des travailleurs du Togo). Bien avant d’emballer l’administration publique, le vent du débrayage a secoué plusieurs secteurs d’activités où le pouvoir a joué au clopin-clopant depuis 2011. Mais les braises sont toujours là encore étincelantes et prêtes à reprendre feu à tout moment parce que l’Etat pompier ne les aurait éteintes qu’en surface. Si sur le papier, les maigres salaires constituent les causent officielles des débrayages, la cherté de plus en plus accrue de la vie en constitue en fait la cause directe et immédiate. En effet le Togolais se nourrit de plus en plus difficilement. Tout est cher, mais les revenus sont demeurés pareils depuis plusieurs décennies. Un diagramme anormal. Un des plus anormaux de la sous région en ce sens que déjà dans les années 90 le Togo est l’un des rares pays où aucune mesure conséquente n’a été prise pour accompagner la dévaluation du f cfa. Tout ceci a été corsé par la longue rupture des liens avec les partenaires en développement. La totalité de ces charges est restée sur la tête du consommateur à la base celui là qui se trouve en même temps être, l’acteur du formel comme de l’informel, le moteur principal du développement économique. « Hier la vie n’était pas aussi rose sous Eyadema, mais elle était moins rude qu’actuellement » résume M. Kokouno responsable d’une entreprise de prestation de service. « Sous Eyadema l’argent circulait puisque lui-même il en distribuait, mais sous Faure on ne sait pas où passe l’argent » se plaint Tino, décorateur et graphiste, en mémoire de l’époque où feu Eyadema, face à la contestation conjuguée de son pouvoir tant à l’interne qu’à l’externe s’est arc-bouté sur des délateurs, des laudateurs, des clientélistes qu’il entretenait à coup de millions de cfa, « des gnass dollars » comme aimaient les appeler affectueusement les habitués du « marché de Lomé 2 » (résidence privée de feu Eyadema qui était alors devenue la Présidence de la République de fait).

Faure Gnassingbé une fois au pouvoir a rompu avec cette triste renommée du pouvoir togolais. « Il faut travailler pour gagner de l’argent » ainsi semble se résumer la dynamique du fils du père : la normale donc. Mais voilà que les togolais se sont remis à travailler, ils produisent de la richesse : une croissance économique continue qui a atteint les 6% l’année dernière ! Mais où va alors cette richesse produite ensemble pour que, vivre décemment demeure encore une illusion pour le togolais six ans après la reprise de la coopération et l’assainissement des finances publiques ?

Le Togo, de surcroit, a été admis en 2011 au programme Ppte (Pays pauvre très endetté) qui a fait annuler près de 82% de la dette bilatérale et multilatérale du pays. Qu’a-t-on fait alors de l’argent qui devait servir à payer le service de la dette ?

Pour se défendre, un inconditionnel du pouvoir montre les grands travaux publics exécutés depuis deux (2) ans par le gouvernement pour, soutient-il « doter le pays d’infrastructures nécessaires à son développement et donner une nouvelle image à la Capitale et aux villes de l’intérieur du pays ». Un constat réel certes, mais pendant ce temps le peuple se meurt. C’est le lieu d’ailleurs de se demander quelle est la contribution réelle de l’Etat dans l’exécution de ces travaux. Un sujet à revisiter plus tard.


L’Etat conscient, mais rien
Dans son discours d’anniversaire d’indépendance du 26 Avril 2011, le Chef de l’Etat togolais a rassuré son peuple d’être bien conscient de la situation paradoxale dans laquelle il végète malgré les initiatives prises au sommet. « Une infime minorité s’accapare les richesses du pays » a-t-il déclaré. Une façon pour l’homme fort du palais de la marina de reconnaitre qu’il est conscient que malgré les nombreuses bouées sociales qu’il a lancées, malgré la courbe économique ascendante, le grand peuple est laissé toujours en bas. On était alors en 2011. Deux ans plus tard, le décor est resté tel et ce, malgré la signature en décembre 2011 de la convention collective inter professionnelle qui a réactualisé les salaires dans les différentes branches d’activités et relevé le smig à 35 000f. Depuis Janvier 2012, l’assurance maladie pour les agents de la fonction publique et assimilés est devenue réalité. Et pourtant, le quotidien est demeuré une course de fond pour le togolais.


Tristesse et nervosité ambiantes….
Les résultats de l’enquête Quibb qui a déclaré une réduction de la pauvreté au Togo de 62% à 58% de 2007 à 2012 ont suscité plus de jurons et de moue que d’approbation tant au niveau des autorités elles-mêmes qu’au sein de la masse. Cela va de soi, puisque le citoyen ne le ressent point dans son portefeuille qui à contrario devient de plus en plus maigre face aux charges dont les couts croissent sans cesse. Aujourd’hui, se nourrir, se déplacer ou communiquer coûte plus cher au Togo qu’au Gabon au Sénégal ou en Cote d’ivoire. À titre d’exemple, le kilo de viande de bœuf est à 3000f à Lomé contre 2500f à Dakar, le litre de lait en carton est à 1200f et le paquet de sucre à 1000f à Lomé contre respectivement 900f et 850f à Libreville. Or, le salaire du fonctionnaire Gabonais, Sénégalais ou Ivoirien fait au moins trois fois celui de son frère togolais. Conséquence, le togolais devient de plus en plus nerveux. La moindre mésentente donne place à des injures, des calomnies de tout genre dans les rues de Lomé aujourd’hui. Un triste spectacle.

Et c’est à juste titre que le magazine Forbes en 2012, identifie le Togo comme le 7e pays le plus triste au monde. Au passage le moral étant en berne, la morale s’écroule à Lomé.
Depuis cinq (5) ans, le Togo a du mal à sortir de la loge rouge du classement mondial de la corruption. La dernière enquête de Transparency International, le classe 128e sur 174 pays moins que ses voisins : le Ghana, le Benin, le Burkina et autres et ce après 2011 : 143e sur 182 pays, 2010 : 134e sur 178 pays, 2009 : 111e sur 180 pays, 2008 : 121e sur 180 pays.

La mendicité qui était hier une pratique reconnue pour une certaine couche socioreligieuse au Togo tant à s’instaurer aujourd’hui en mode général. Il est facile aujourd’hui de se faire apostropher dans la rue par un jeune voir même un moins jeune pour vous quémander la générosité. Un phénomène rarissime hier au Togo. Dans la foulée, les crimes sociaux prennent de plus en plus place dans la cité togolaise : des braquages récurrents par ci, meurtres avec mutilations de jeunes filles par là, trafic de drogue etc……
La passivité et la candeur légendaire du togolais, tant de plus en plus à céder place à l’agressivité, au vice, face à la lenteur des gouvernants à lui alléger le quotidien.
La société togolaise s’éffond-t-elle. Ce qui est sûr est que la paix sociale est mère de la paix politique. Et cela va de soi.

Joël EGAH