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Après les Éperviers, Kofi Yamgnane : jusqu’à quand le règne de l’arbitraire? Par Sénouvo Agbota ZINSOU

 Cela pourrait paraître un amalgame, mais en fait c’est un état d’esprit qui règne en Afrique en général et au Togo, en particulier : nous avons beau parler de démocratie, de l’existence des institutions des États républicains, de l’État de droit... Ce qui règne, c’est l’arbitraire pur et simple.

Nos dirigeants usent de l’arbitraire et nous subissons l’arbitraire sans une volonté ferme de secouer son joug, de nous en débarrasser. Cela ne provient-il pas de ce que nous nous arrêtons à l’événementialité des faits et même simplement à leur superficialité, ne cherchant pas à les approfondir pour savoir d’où ils viennent et surtout où ils mènent? En sorte qu’après chaque coup, comme venant de la fatalité, il ne nous reste plus qu’à nous poser les questions: à quand le prochain? Qui va-t-il frapper? Dans quel domaine?

La source de tous ces coups est unique. Elle n’est pas dans une nature, et n’est pas liée non plus à la fatalité. Elle est dans une à habitude à abuser du pouvoir.
J’avais à peine parlé de la décision arbitraire prise, d’une part par le gouvernement togolais de faire rapatrier les Éperviers après la fusillade contre leur bus au Cabinda et de celle d’autre part, tout aussi arbitraire, de la CAF de suspendre le Togo des deux prochaines CAN, quand est tombé l’arrêt de la Cour Constitutionnelle du Togo rejetant la candidature de Kofi Yamgnane à l’élection présidentielle.

Qui se réjouit d’une telle décision, quelles que soient ses opinions, quel que soit son camp, pour une raison ou une autre, ne comprend simplement pas que nous sommes dans un cercle vicieux, un cycle diabolique comme diraient les Allemands. Accepter cet arrêt d’une Cour dont nous connaissons les iniques exploits réalisés par le passé, pour cette raison que les candidatures des sept autres postulants à la magistrature suprême sont retenues équivaudrait à accepter l’inadmissible, à admettre que d’autres coups d’un régime dont nous connaissons la nature peuvent venir. Nous avons déjà avalé pas mal de coups du même genre, de la part du même régime, depuis 43 ans. De mille manières, parfois directement, parfois par l’intermédiaire des appareils qui le soutiennent, de l’intérieur comme de l’extérieur du pays. Notre caractéristique principale qui l’encourage à les répéter, c’est notre manque de réaction appropriée, notre aptitude à nous plier, parfois après quelques remous, notre résignation à la fin. N’est-il pas temps de dire une fois pour toutes non aux coups tordus?

C’est un sentiment noble qui anime peut-être Kofi Yamgnane quand il déclare que, puisqu’il n’y a pas de recours, il veut se mettre désormais à la défense d’une candidature unique contre le fils d’Eyadema. Mais, d’abord, avant d’en arriver là, pourquoi, connaissant le régime que nous prétendons combattre, il n’y a pas eu très tôt, non seulement cette unité de candidature, mais l’unité tout court? Il y a un recours, le peuple togolais : tout le problème est de le mobiliser contre l’arbitraire.
Ce serait, à mon avis désolant, très désolant que face au rejet de la candidature de l’un d’eux, les réactions de nos candidats viennent, encore cacophoniques, renforcer l’arme de la division souvent utilisée par le régime. Et Kofi Yamgnane ne doit pas être seul.

Mais s’il y a une réaction concertée, unie et forte, ne pourra-t-elle pas le faire trembler?
Il n’a pas suffi à ce système de nous avoir fait subir l’arbitraire d’une constitution taillée sur mesure pour Eyadema puis pour sa descendance, l’arbitraire d’un découpage électoral aux relents de tribalisme, l’arbitraire d’un mode de scrutin qui lui est favorable, à lui seul, l’arbitraire de listes électorales conçues à des fins de tricherie, l’arbitraire des pourcentages de voix attribués aux candidats, décidés par le pouvoir, l’arbitraire de faux résultats prononcés par une commission électorale et une cour constitutionnelle, toutes deux à ses ordres, l’arbitraire de la force qui massacre nos compatriotes, anéantit nos espoirs, tous nos efforts, nos sacrifices consentis pour la démocratie. Il s’est arrogé en plus le pouvoir de dire qui peut être candidat et qui ne peut l’être. Que nous prépare-t-on encore dans les ateliers du RPT?

Réfléchissons et agissons vite, car le temps presse. Il s’agit de la nation togolaise, il s’agit de l’avenir de nos enfants et de nos petits-enfants : c’est aujourd’hui qu’il faut libérer le Togo du joug de l’arbitraire. Nous ne défendons pas une candidature, ni un homme, mais un principe, un des principes sur lesquels notre démocratie sera bâtie, ou ne sera pas.
Il faut que cet acte arbitraire soit le dernier à être pris par la Cour Constitutionnelle et que plus jamais aucune institution de la République togolaise ne soit amenée à en prendre un du même genre.

Par cet acte, le système Gnassingbé nous offre peut-être une occasion en or pour secouer son joug. Ce serait amèrement regrettable de ne pas la saisir.

Sénouvo Agbota ZINSOU