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Démocratisation au Togo : Un pas en avant, deux pas en arrière Le régime Eyadema danse le Tango

Religion
Ces derniers temps, nous avons assisté dans notre pays à un phénomène ahurissant qui cache mal la finalité poursuivie par nos dirigeants en ce qui concerne le futur scrutin présidentiel prévu pour cette année.

Le 30 décembre 2002, l'Assemblée Nationale issue de la mascarade électorale du 27 octobre 2002, procède à une réécriture de la Constitution approuvée par référendum en 1992 par le peuple togolais dans son écrasante majorité.
Pour justifier cet acte d'un autre temps, on s'est servi d'un euphémisme ridicule en galvaudant le mot " toilettage " utilisé abusivement, en la circonstance, puisqu'en définitive, en guise de toilettage, au moins 35 articles de la Constitution ont été ciblés et modifiés.

Le jeudi 07 février 2003, c'est au tour du Code Electoral de connaître le même sort. Cette fois c'est plus de 80 articles qui ont été visés.

La première conséquence immédiate de la modification du Code Electorale, c'est que la Commission Electorale Nationale Indépendante est redevenue une Commission National Electorale comme en 1993.

Ce recul est politiquement très inquiétant surtout lorsqu'on sait que la tendance générale en Afrique c'est plutôt la mise en place d'une Commission Electorale Indépendante ou Autonome signe de progrès et de transparence.
Les risques de fraudes et d'arbitraire sont réels lorsqu'une élection est gérée par le Ministère de l'intérieur dans un pays où la neutralité de l'Administration est sujette à caution. Pire, le Ministre de l'intérieur lui-même reste un officier qui peut recevoir des ordres et les exécuter.

Dans ce cas de figure, ce n'est pas un Magistrat qui, dans le passé, avait plusieurs fois fait preuve d'allégeance au pouvoir exécutif en prononçant des verdicts incroyables qui sera la meilleure garantie de l'expression populaire.

En politique, le hasard n'existe pas. Ainsi, il faut comprendre que la nomination de M. Pétchélébia au poste de Président de la Cour d'Appel et le fait que le nouveau Code Electoral désigne ès qualité le Président de la Cour d'Appel, Président de la commission Electoral Nationale ne sont pas fortuits.

En tout état de cause, personne n'est dupe. La démocratisation a du plomb dans les ailes. Désormais tous les acquis des années 90 sont passés par le compte perte et profit. Le régime Eyadéma, sur ce terrain, danse le Tango, fait un pas en avant et deux pas en arrière et tout porte à croire qu'il y a plus de recul que d'avancée. C'est un constat.

A preuve, la dernière manifestation de soutien organisée le jeudi 6 février 2003 en faveur du Chef de l'Etat, par les Chefs traditionnels de la région maritime à Lomé II.

D'après notre confrère Togo-Presse dans son édition N° 6491 du vendredi 7 février 2003, " dans le souci de récompenser le Chef de l'Etat pour sa politique de paix, d'union nationale, source de stabilité et de développement économique, les forces vives de la Région Maritime décident que le Président de la République soit leur unique candidat aux prochaines élections présidentielles dans notre pays. Ces populations s'engagent en conséquence à le plébisciter le moment venu ".

Ce reportage est assez édifiant. Certes, les Chefs traditionnels ont le droit de soutenir le Chef de l'Etat mais seulement en leur propre non ou en celui de leur Association. Mais là où il y a amalgame c'est lorsqu'ils parlent au nom des populations. Nous ne voulons pas mettre en exergue l'injure ainsi faite à l'intelligence des Togolais lorsque de telles incongruités sont publiées. Comment peut-on raisonnablement croire qu'en 2003, les Togolais réagissent de façon grégaire pour plébisciter un Chef d'Etat qui a à son passif plus de 36 ans de règne ?

Tout d'abord en quelle qualité les Chefs traditionnels peuvent-ils parler au nom de leurs populations puisque au terme de l'Article 143 de la Constitution, il est stipulé ce qui suit : " L'Etat reconnaît la chefferie traditionnelle gardienne des us et coutumes ". Un chef traditionnel n'a aucune qualité pour aller parler au nom des populations, surtout en matière électorale. En s'octroyant le droit de parler au nom des populations, ces chefs bafouent les droits et libertés les plus fondamentaux des citoyens. C'est une grave violation de la Constitution.

Le vote relève d'un droit fondamental reconnu à chaque citoyen. L'exercice de ce droit relève exclusivement de la volonté de chacun. Et c'est seulement dans le secret de l'isoloir que le citoyen exprime son choix. Vouloir faire croire que les populations de la Région Maritime ont délégué leurs droits de vote à leurs Chefs Traditionnels, c'est tout simplement se moquer du Président de la République lui-même. A moins que, quelque part, on s'organise pour voter à la place de ces populations, il est impossible de savoir à l'avance le choix que chacun aura à faire.

A ce sujet, il nous semble indiqué de préciser que ces genres de pratiques relèvent d'une autre époque. Le Togo n'est plus sous un régime de parti-Etat. Le Togo ne s'apparente pas non plus au régime soviétique de triste souvenir. Le RPT doit trouver d'autres moyens de propagande et cesser de s'accrocher à des méthodes qui font sourire tous les observateurs de la scène politique nationale et qui ternissent l'image de notre pays.
Ceux qui organisent ces genres de spectacles pour amuser ou détendre le Chef de l'Etat lui font du tort.

Les temps où les peuples plébiscitaient leurs Présidents sont révolus. Même tout dernièrement en France, Chirac n'a pas été plébiscité malgré la situation inédite créée par le score du Front National au 1er tour des Présidentielles et qui a mobilisé toute la France pour faire barrage.

Partout dans le monde, la démocratie a laminé les ex-partis uniques. En Afrique particulièrement, les partis qui ont survécu, comme le PDCI en Côte d'Ivoire, ont dû se résoudre à d'énormes refontes et sacrifices.

Au Togo, le RPT refuse toute rénovation et toute adaptation. Le RPT est un parti qui vit sur le passé et qui n'offre plus de perspectives d'avenir. Ce parti ne veut même pas tolérer l'existence des partis adverses. C'est pourquoi des dirigeants continuent à se comporter comme à l'époque du parti unique - parti-Etat.

Ce n'est pas parce que les partis de l'opposition n'ont pas accès aux médias publics (médias d'Etat) qu'il faut croire que tout les Togolais sont devenus, par la baguette magique, de nouveaux membres du RPT.

En tant que Togolais soucieux de l'image de notre pays à l'extérieur, nous pensons que l'entourage du Chef de l'Etat doit s'investir pour que certaines pratiques humiliantes pour l'Homme Togolais cessent.

Nous n'avons pas la prétention de soutenir que le Président de la République est plus ou moins populaire hier ou aujourd'hui. Nous disons que ceux qui prétendent parler quotidiennement au nom des peuples de leurs villages, de leur Préfecture etc. sont des fieffés menteurs parce qu'ils quittent en catimini leurs villages, leurs préfectures pour venir faire du folklore à Lomé II.
Il ne suffit pas de mettre 100, 200 ou même 300 000 personnes dans les rues pour garantir la popularité à un homme politique aussi charismatique soit-il.

Voltaire disait : "Qu'est-ce donc la politique si ce n'est l'art de mentir à propos " Si c'est seulement ça la politique, le RPT est le meilleur parti au monde.

Rodrigue