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FAURE est-il l'homme de la situation ?

Togo - Politique
Que l'opinion me pardonne et que les internautes ébranlés par les remous de l'actualité me traitent avec indulgence si je reviens à la charge de si tôt. Mon esprit ne trouvera pas de repos avant que je ne soumette à l'intelligence de nos braves compatriotes ces quelques autres assertions. L'affaire Faure-Kpatcha ne doit pas être l'arbre qui cache la forêt. Restons vigilants pour éviter que l'accessoire prenne le pas sur l'essentiel !
  

Je voudrais dire clairement pour commencer que je n'ai rien contre la personne de Faure Gnassingbé, pas plus d'ailleurs qu'à l'encontre du frangin Kpatcha. Vis-à-vis des hommes, je n'ai aucun à priori, eux qui n'ont pas choisi d'être nés d'un père potentat qui a règné à vie dans la tyrannie et la médiocrité au point de plonger la nation togolaise dans le chaos et la regression tous azimuts où elle s'est retrouvée. Il est vrai que les récits bibliques comportent parfois un certain paradoxe au sujet de crimes commis par les parents et dont les descendants sont tenus de payer le prix fort, de génération en génération. De nos temps modernes il y a une certaine indécence à vouloir imputer les torts des parents à leurs enfants ou ayant-droits.
Ne sont-ils victimes pas eux-mêmes du poids d'une filiation qu'en d'autres circonstances il n'auraient jamais désirée, s'ils avaient pu choisir? D'ailleurs le dictateur ne croyait pas si bien dire de son vivant, lui qui affirma un jour : "Personne ne vient au monde en choisissant ses parents, son ethnie ou sa région". En vérité seuls ceux qui partagent le quotidien des enfants Eyadéma pourraient peut-être un jour nous dire si ceux-ci ne souffrent pas férocement d'avoir à se défendre toute leur vie de n'avoir aucune responsabilité dans les nombreux crimes du régime. Ce lourd passif doit être bien pénible à porter pour qu'on éprouve l'envie d'en rajouter.


Le sens de l'histoire

Les humains ont toujours besoin d'un sens de l'histoire semblable au sens d'orientation des grands oiseaux migrateurs et face aux circonstances qui jalonnent notre parcours nul ne peut se contenter d'une existence sans hantise du lendemain. Un peuple c'est d'abord une mémoire collective. D'où la répulsion voire l'hostilité que nourrissent la grande majorité des Togolais à l'idée de voir un des Gnassingbé à la tête de l'Etat, après le long règne d'Eyadéma, qui plus est l'un de ses fils. Bien sûr, que dans ce système glabalement nuisible, il se trouvait quelques hommes de principe qui ont essayé dans la limite de leur force de bien faire. Ils sont des oiseaux rares pour qui j'éprouve personnellement une profonde estime.

D'ailleurs, Il a fallu une bonne dose d'inculture historique et un toupet sans pareil, à ceux (les généraux de pacotille et leurs appuis franco-africains) qui ont concocté cette solution pour notre pays, à la mort soudaine d'Eyadéma. C'est comme écorchés à vif et blessés dans leur amour-propre que les populations ont légitimement choisi d'en découdre plutôt que de se résigner à ce qui avait tout l'air d'une monarchie naissante. Les souffrances endurées jusque là sous le père et les sacrifices consentis par le peuple sont trop considérables. Mais une fois encore la nation a été violentée et violée avec à la clé des centaines de morts et de blessés et un nouveau drame humain d'une ampleur inouie.

La tyrannie, on le sait, est aussi vieille que le monde. Et tous ceux qui, complices d'une manière ou d'une autre de l'oppression, aiment à nous faire la lecon en soutenant que nous sommes trop impatients le savent aussi. Les meilleurs projets de société, les démocraties occidentales ou d'autres cieux que nous admirons ont en eu pour leur compte. Les pages sombres de leur histoire sont longues et bien terribles aussi. Confronté en son temps au sinistre de la nation en perdition Caritas Condorcet s'etait écrié : "Gémissons de voir la grande nation livrée aux méprisables charlatans". Au Togo les charlatans de la politique sont hélas légion.

Quels que soient les enseignements à tirer de notre traumatisante histoire commune, les avis n'ont pas fini de diverger sur pourquoi et comment nous en sommes arrivés là. Qu'il s'agisse d'un impitoyable coup du sort qui s'est abattu à leur défendant sur les braves populations togolaises ou du prix élevé d'une serie d'erreurs historiques évitables. Chacun est libre de conclure selon ses appréciations et ses sentiments intimes.


Etat de la nation et promesse d'avenir

Pour revenir à l'état actuel de la nation et aux innombrables impératifs à réaliser sans tarder pour redorer le blason à la nation et la remettre à la hauteur des défis de notre temps, il importe pour les gouvernants qui doivent certainement pouvoir mesurer les retards accumulés sur nos voisins de la sous-région d'agir d'une main ferme et déterminée. Peu importe qu'ils soient de fait ou légitimes, puisque ce sont ceux qui ont en main les leviers de commandement de l'Etat. C'est là-dessus que j'attends personnellement le chef de l'Etat togolais.

Les bonnes intentions que d'aucuns prêtent volontiers à Faure, et ceux qui se répandent quasiment en louanges, arguant de liberté d'expression et de foisonnement de la presse privée et autres restent largement redevables de preuves. Les bonnes intentions n'engagent que ceux qui y croient. La liberté d'opinion et de circulation, celle de la presse sont des expressions de la démocratie et ne constituent nullement l'essence même de ce système fondé sur la bonne gouvernance et le respect des institutions issues du suffrage des citoyens. En d'autres termes la démocratie est une ambition collective et une identité partagée.

Ce qu' attendent les Togolais ce sont des actes et une amélioration progressive du quotidien. Des décisions pertinentes et patriotiques. Une volonté politique plus affirmée au sommet de l'Etat, un engagement républicain à relever le pays et à fonder les institutions qui garantissent que le citoyens ne soit à la merci des détenteurs de la force. C'est pourquoi je pense que Faure doit montrer plus de couilles pour se résoudre enfin à balayer proprement la maison Togo. Ceci demande, je le sais, une forte dose de courage voire de dextérité en raison des pesanteurs qui existent au RPT et dans le viel appareil de l'armée peuplés de bénis du père qui poursuivent exclusivement des intérêts occultes, comme l'argent facile et l'influence, l'accumulation de biens matériels considérables sur le dos des citoyens. Eux ils entendent plutôt pérenniser la coupe réglée et le pillage de l'argent public et jamais il ne leur vient à l'esprit d'avoir un jour à rendre des comptes, ni de réfléchir à l'avenir sombre que leurs pratiques excessives réservent aux générations présentes et à venir.

Le temps dis-je est venu pour que Romulus tue Remus pour fonder Rome !


Un centième talentieux

Au monent où j'écris ces lignes, je viens de tomber à ma grande joie sur le dernier message à la nation du président Faure. Et quel évènement? Non en la gravité de l'heure en ce qui concerne la présomption de coup d'Etat militaire récemment déjoué, mais en la clarté des mots choisis pour parler aux Togolais. Pour une fois dans ma vie d'adulte je viens de me sentir fier d'être togolais, et je pense qu'il en sera de même pour tous mes compatriotes qui auront lu ou écouté aussi ce message. L'instant est historique, car de mémoire de Togolais jamais un chef de l'Etat ne s'est adressé au pays avec autant de respect et de sens de responsabilité.

C'est à l'honneur de Faure Gnassignbé. Et si je considère les engagements qu'il y prend pour consolider les bases extrêmement fragiles de notre démocratie, une foule d'appréhensions mérite d'être revisée forcément. Me revient à l'esprit, cette théorie chère à mon aîné Godwin Tété-Adjalogo et empruntée à Dubois, celle du centième talentieux. Il y a t-il donc dans la cour des Gnassingbé un centième talentieux (comprendre un talentieux sur cent individus)? Il reste à Faure de nous convaincre qu'il s'agit de beaucoup plus qu'un effet d'annonce. Les mois qui viennent doivent nous apporter des réponses concrètes sur ces questions. La balle est dans son camp.

Osons croire qu'il ne s'agit que seulement de mots parce qu'il serait trop dommage pour la nation et pour Faure d'avoir berné le pays et de n'avoir pas su saisir la chance qui s'offre à lui de passer dans l'Histoire comme l'homme qui a pris à bras le corps le sort misérable de 5 millions de togolais et qui a mis fin à la longue nuit de plus de quarante ans sur la terre de nos ancêtres. Osera t-il braver les fourches codines du RPT, la terreur des caciques du clan, et toutes les forces obscures qui jurent de le perdre?

Une chose est certaine. S'il n'a d'ambition que la grandeur du pays, s'il tend sincèrement la main à l'opposition, s'il écoute et communique de manière appropriée sur les chantiers institutionnels qu'il ouvre, et s'il veille à ce que ses collaborateurs et leurs exécutants du sommet à la base de l'administration appliquent les recommandations à la lettre et dans l'intérêt supérieur des populations, alors la providence, Dieu, les mânes de nos ancêtres et l'intelligence du peuple togolais qu'il aura gagné à sa noble cause l'accompagneront et le protégeront contre tout mal.

Alors le triomphe de la force de la loi sur la loi de la force sera éternel. Ô que ce serait beau !


Karlsruhe, le 19 Avril 2009

Tino Agbélenko DOGLO
Citoyen et ex-prisonnier d'opinion.