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Les yeux du monde se tournent vers la Libye

Libye - Diplomatie
Le problème de la Libye n'est désormais plus une simple question régionale. Des mises en garde se font entendre de l'Égypte à New York quant à la menace internationale qui émane de ce pays déchiré.
"La situation a changé," a déclaré l'ambassadeur de la Libye auprès des Nations unies Ibrahim Dabbashi au Conseil de sécurité le jeudi 28 août, mettant également en garde contre une "guerre civile", des propos rapportés par l'AFP.

Alors qu'islamistes et nationalistes se battent pour le pouvoir, les affrontements armés ont fait preuve "d'une gravité sans précédent, et extrêmement alarmante", a également expliqué l'envoyé des Nations unies en Libye sortant au Conseil de sécurité.

"La menace que fait planer la propagation des groupes terroristes est devenue réelle. Leur présence et leurs activités dans un certain nombre de villes libyennes sont connues de tous," a indiqué Tarek Mitri dans son élocution finale en tant que président de la Mission d'appui des Nations unies en Libye (MANUL).

Ce sont les civils qui en paient le prix, a ajouté Mitri, notant que "l'utilisation par toutes les parties d'armes lourdes dans des zones densément peuplées a semé la terreur et contribué à l'augmentation du nombre de victimes innocentes, notamment parmi les enfants".

En réponse, le Conseil de sécurité a imposé des sanctions aux milices, comme des interdictions de déplacement et le gel de leurs biens, et a appelé toutes les parties en Libye à respecter un cessez-le-feu immédiat. Les quinze membres de cette instance ont en outre condamné les violences faites aux civils.

Mais ces mesures sont insuffisantes, mettent en garde les experts et les personnalités publiques.

À l'issue de la réunion du Conseil de sécurité, le Président français François Hollande a appelé à "un soutien exceptionnel aux autorités libyennes pour rétablir l’État".

"Si nous ne faisons rien de sérieux, rien de politique, rien d’international, le terrorisme se répandra dans toute la région," a-t-il précisé.

La Libye est dans un état de "confusion totale", a ajouté Hollande, soulignant l'existence de "deux parlements, deux gouvernements", et la présence des terroristes "attendant simplement une chance pour agir".

C'est en Afrique que les répercussions de ces agitations sont le plus à craindre, comme l'ont estimé les pays voisins de la Libye lundi, au Caire.

Réunis pour parler de cette menace grandissante, les ministres des Affaires étrangères de Libye, d'Égypte, d'Algérie, de Tunisie, du Soudan et du Tchad ont appuyé une proposition égyptienne appelant au désarmement des milices rivales, et convenant avec Le Caire qu'une intervention étrangère n'était pas souhaitable.

Cette réunion ministérielle est intervenue quarante-huit heures après que les milices islamistes se sont emparées de l'aéroport de Tripoli et ont contesté la légitimité du parlement libyen élu au mois de juin.

"Cette initiative est conforme à plusieurs principes de gouvernance," a expliqué le chef de la diplomatie égyptienne Sameh Shoukry. "Le plus important est le respect de l'unité et de la souveraineté de la Libye, le rejet de toute ingérence dans ses affaires intérieures, le respect d'un dialogue global, le renoncement à la violence et le soutien apporté au processus politique".

Les ministres ont en outre décidé de soutenir "les institutions légitimes, en particulier le parlement", de la Libye.

"Nous avons ressenti les répercussions de l'escalade de la situation en Libye sur la sécurité des pays voisins à travers la présence d'éléments extrémistes et terroristes," a poursuivi Shoukry.

La réunion du Caire, qui a également vu la participation de responsables de la Ligue arabe et de l'Union africaine, a insisté sur la nécessité "de combattre le terrorisme sous toutes ses formes, de tarir ses sources de financement et de lutter contre le crime transfrontalier organisé".

Les voisins de la Libye ont également salué la "coordination du soutien international" en matière d'aide à la reconstruction et à la réhabilitation des institutions de l'État libyen.

Le pays est désormais divisé sur tous les plans, avec deux parlements, l'ancien dominé par les islamistes et l'autre considéré comme majoritairement libéral et démocratique. Même l'armée n'a pas échappé à cette division. Chaque partie s'est aujourd'hui dotée de son propre chef militaire.

La réunion des pays voisins de la Libye a choisi d'accorder son soutien au parlement libyen élu et au gouvernement d'Abdullah al-Thani.

"Nous sommes bien conscients que quelques groupes, comprenant certains membres du Congrès national (CGN), veulent gérer la Libye à leur manière," a indiqué le ministre libyen des Affaires étrangères Mohamed Abdel Aziz au cours d'une conférence de presse conjointe avec son homologue égyptien.

"Nous subissons aujourd'hui le terrorisme, l'extrémisme et des orientations idéologiques qui n'appartiennent pas à la culture du peuple libyen," a expliqué Abdel Aziz.

Le ministre a appelé la communauté internationale à fournir "une couverture pour la Libye et les autres pays intéressés par la lutte contre le terrorisme".

La Libye doit "construire son armée et sa police, son système de justice pénale avec toutes ses composantes, depuis les tribunaux jusqu'aux prisons, et améliorer son service du renseignement," a-t-il précisé.

"Nous n'avons pas demandé d'intervention militaire, mais nous avons demandé à ce que la mission des Nations unies soit étendue, afin de stabiliser et reconstruire les institutions," a poursuivi le ministre libyen.

Pour le ministre des Affaires étrangères égyptien Shoukry, les violences en Libye sont source d'inquiétude aux niveaux intérieur, régional et international.

"Les terroristes ne limitent pas leurs activités à des opérations au sein du territoire libyen, mais pratiquent également le commerce et le trafic d'armes avec les pays voisins […]. Ceci pourrait menacer la stabilité de ces pays et avoir des répercussions sur les intérêts de pays en dehors de la région, ce qui pourrait conduire à une intervention dans les affaires de la Libye, et il faut œuvrer à éviter cela," a-t-il indiqué.

Pour sa part, le ministre tunisien des Affaires étrangères Mongi Hamdi a souligné la nécessité d'un dialogue et d'un consensus national en Libye.

"La collecte des armes détenues par les milices ne sera pas possible sans un dialogue et un accord politique entre toutes les parties libyennes," a déclaré Hamdi.

Le chef de la diplomatie algérienne Ramtane Lamamra a appelé à "une solution négociée à la crise libyenne".

"Les négociations doivent constituer un effort excluant les groupes qui penchent en faveur du terrorisme," a affirmé Lamamra.

Mais malgré les entretiens de haut niveau tenus cette semaine en vue de rétablir la sécurité et la stabilité dans leur pays, les Libyens demeurent sceptiques.

Bassam Zwei, docteur, ne place que peu d'espoir dans l'initiative des pays voisins de la Libye : "j'ai peur que l'appel au cessez-le-feu formulé à l'issue de la réunion ne soit lancé dans le vide," a-t-il déclaré à Magharebia.

"En Libye, les appels au dialogue, à l'arbitrage et à l'intérêt supérieur de la nation ne manquent pas, mais personne ne les entend. Chaque groupe s'accroche à ses positions, à ses sites et à ses armes", a poursuivi Zwei.

"Quels moyens faut-il adopter pour amener les parties libyennes à s'asseoir à la table du dialogue, jusqu'à obtenir le désarmement des milices ? Je pense que pour y parvenir il faut une intervention forte, et pas simplement une déclaration d'intention," dit-il.

Imad Bustami, un dirigeant d'entreprise, a déclaré à Magharebia : "le peuple libyen a besoin de l'aide de ses voisins et de la communauté internationale. Hé, le monde, nous voulons la paix, la sécurité et la stabilité".

Pour Mohamed Yunus, enseignant libyen : "toute menace à la Libye est une menace pour les pays voisins, et représente également un risque pour l'Europe."

"Que va-t-il se passer en présence de terroristes qui veulent la destruction de la Libye ainsi que la destruction du monde entier ?" a-t-il demandé.

Pour Wafa Hassi, 23 ans et étudiant à la Faculté de médecine, le temps presse et le monde doit aider la Libye avant qu'il ne soit trop tard.

"On ne veut pas de réunions ; on veut une solution immédiate, comme au début de la révolution avec l'aide de l'OTAN," a-t-il expliqué.

"Les milices disposent de munitions, d'armes et d'assez d'équipements pour détruire toute la Libye, et elles n'hésiteront pas si personne ne les arrête," a-t-il conclu.