Vous etes sur la version ARCHIVES. Cliquez ici pour afficher la nouvelle version de iciLome.com
 10:22:42 AM Jeudi, 28 Mars 2024 | 
Actualité  |  Immobilier  |  Annonces classées  |  Forums  |  Annuaire  |  Videos  |  Photos 


Kuibouka 20

Togo - Show biz
Depuis la Showa, c’est sans doute le plus grand carnage dont l’homme s’est rendu coupable. Entre avril et juin 1994, les extrémistes rwandais ont réussi l’exploit de faire avaler leurs actes de naissance à des centaines de milliers de leurs compatriotes. Plus de 800 000 morts, indique-t-on à différentes sources. Près de vingt ans après le chaos rwandais, on a de la peine à imaginer, à expliquer et à comprendre comment des frères que très peu de choses différencient en sont arrivés à se détester autant au point de se tuer comme des mouches.

Au Rwanda, on n’a pas d’explication qui dépasse celle de la différence ethnique : les tutsi d’un côte et les hutu de l’autre ne s’aimaient ni ne s’acceptaient. Le colon, dans la volonté d’imposer sa suprématie et son pouvoir sue le territoire, a exploité à fond les différences, jouant savamment à opposer les deux groupes afin d’en imposer à eux deux. Diviser pour régner, comme on dit, les graines ainsi mises en terre ont produit des fruits, des fruits si amers qu’il faut se demander si l’on a réussi à déterrer ou à anéantir pour toujours lesdites graines.

Sans avouer du pessimisme, je puis dire à tout le moins que je suis sceptique là-dessus. Au Congo et bien ailleurs, des génocidaires se sont terrés ; cachés sous de nouveaux noms ou totalement fondus dans les masses des grandes villes congolaises où existaient des poches de populations alliées. Je suppose donc que tous ceux-là qui ne se sont pas repentis de la haine anti-tutsi et qui ne participent pas au processus de réconciliation demeurent les adversaires désignés à la cohésion nationale au Rwanda. Loin de moi toute intention d’oiseau de mauvais augure mais je crois qu’il n’est pas infondé d’imaginer que ces génocidaires irréductibles et vindicatifs guetteront de nouvelles occasions pour reprendre le dessus au Rwanda. Alors, personne ne peut présager de ce qui pourra se passer.

Le président Kagamé fait tout ce qu’il peut pour panser les plaies du Kuibouka. La disparition sur les papiers officiels des notions tutsi et hutu est un élément essentiel mais les hutu qui sont restés au pays ont-ils adhéré au processus de bon cœur ? Ont-ils admis sans possibilité de volte-face la nouvelle domination des tutsi ? Ce sont des questions à ne pas ignorer. Quoi qu’il en soit, il me semble vital qu’à l’occasion de cet anniversaire du génocide rwandais le continent africain réfléchisse franchement aux voies et moyens à utiliser pour éviter la répétition ici ou ailleurs d’un tel drame. L’Union africaine est ici interpelée mais connaissant les incohérences et la mocheté de cette union, je sais d’avance qu’elle ne peut rien y faire. Parce qu’elle est incapable de dissuader la mauvaise gouvernance, les présidences éternelles et les enrichissements illicites, parce qu’elle est demeurée une caisse de résonnance des despotes continentaux dont l’unique préoccupation est de rester au pouvoir.

Après le Rwanda, il y a, à peu de choses près aujourd’hui la Centrafrique. J’ai peur d’un nouveau Rwanda, là-bas ou ailleurs, du moment où le mode de gouvernance n’est toujours pas orienté exclusivement vers le bonheur général.

Carole AKOGOVI