Vous etes sur la version ARCHIVES. Cliquez ici pour afficher la nouvelle version de iciLome.com
 11:41:50 PM Jeudi, 25 Avril 2024 | 
Actualité  |  Immobilier  |  Annonces classées  |  Forums  |  Annuaire  |  Videos  |  Photos 


Interview de Richard Laté Lawson-Body : « L’art ne doit pas souffrir des interprétations élitistes. Il faut donner la chance à n’importe qui s’en approche, de tirer un maximum de plaisir »

Togo - Societe
Interview de Richard Laté Lawson-Body : « L’art ne doit pas souffrir des interprétations élitistes. Il faut donner la chance à n’importe qui s’en approche, de tirer un maximum de plaisir »
Pour y arriver, il procède par un alliage entre la peinture et la calligraphie en écrivant des textes poétiques sur les tableaux qu’il conçoit.
Approché par l’Agence Afreepress, il confie que «l’art ne doit pas souffrir des interprétations élitistes. Il faut donner la chance à n’importe qui qui s’en approche, de tirer un maximum de plaisir »
Très engagé dans la lutte pour les droits humains, militant dans Amnesty International-Togo depuis septembre 2012, Richard Laté Lawson-Body accentue son engagement dans ce sens en abordant des thèmes liés à la paix.
« L’idée de la paix et les thèmes des droits humains vont de pair, pour le simple fait qu’on ne saura parler des droits humains que lorsqu’il y a la paix », s’exprime-t-il.

Lire l’intégralité de l’interview

Afreepress.info : Vous êtes un artiste s’illustrant dans la peinture et dans la calligraphie. Expliquez-nous comment vous êtes arrivé dans le monde artistique.

Richard Laté Lawson-Body : Je tiens d’abord à remercier l’Agence Afreepress pour l’occasion offerte. Tout est parti de mes premiers jours à l’école primaire. A mes débuts, je n’avais pas une bonne écriture et mes parents ont pris la décision de m’inscrire chez un calligraphe qui travaillait à la présidence de la République.
Après quelques séances de travail, l’enseignant a découvert que j’avais d’autres potentialités à développer. Il a donc demandé à mon père de m’inscrire en tant qu’apprenti pour suivre une formation complète de 3 ans.
Après cette formation et à l’âge de 9 ans, j’étais déjà très bon en calligraphie. J’ai donc commencé par écrire sur les cahiers de mes camarades, au tableau. Au fur et à mesure que je grandissais, d’autres besoins se faisaient sentir dans ma maison et dans mon entourage. C’est à partir de là que j’ai commencé par illustrer mes écrits d’images pour rendre mes productions plus expressives.
J’ai donc commencé par expérimenter le dessin de manière autodidacte surtout avec l’aide de monsieur Aubert Wotor qui était mon professeur de dessin à l’époque.

Afreepress.info : Les artistes pour la plupart ont une source privilégiée d’inspiration. D’où tirez-vous la vôtre ?

Richard Laté Lawson-Body : L’homme est ma première source d’inspiration. Sur la plupart de mes tableaux vous verrez des têtes humaines. Ceci explique le fait que l’homme n’est rien sans sa tête. Après l’homme, je tire mon inspiration de tout ce qui se trouve dans la nature.

Afreepress.info : Le calligraphe que vous êtes influe-t-il sur le fait que vous écrivez des textes sur la majorité de vos tableaux ?

Richard Laté Lawson-Body : J’ai commencé avec des tableaux réalistes, mais avec le temps, je suis rentré dans l’art abstrait qui met en exergue des images codées, des symboles qui sont inaccessibles au public.
Pour éviter à l’art de souffrir d’une quelconque interprétation élitiste, j’écris certains messages sur des tableaux pour permettre à n’importe qui va vers mon art, d’y tirer un maximum de plaisir.
Ce que j’écris sur les tableaux, c’est de la poésie qui enchante tous lecteurs et leur permet de mieux percer le mystère de mon art. La belle écriture aussi attire les regards.

Afreepress.info : Que peignez-vous exactement ?

Richard Laté Lawson-Body : Dans mes tableaux, vous verrez en grande partie la nature humaine. Il y a aussi la « paix » qui est un thème majeur revenant dans la plupart de mes créations artistiques. Je vois souvent que nous vivons dans un monde où il n’y a qu’un semblant de paix.
L’exemple de la famine, du manque des infrastructures routières, en est une illustration. Tout ce qui se fait dans le sens d’améliorer ces secteurs, ne sont que des réalisations à court terme. Il n’existe pas véritablement des investissements dans l’humain. L’exemple des routes peut revenir.
Il y a plusieurs routes en construction à Lomé qui absorbent la force d’un grand nombre d’ouvriers qui travaillent et vivent dans des conditions précaires. Je défends donc mordicus la paix dans mes œuvres en faisant la promotion d’une paix durable.
Pour moi, il faut que toutes les structures comme les écoles et autres reflètent la paix à travers la beauté qui doit y régner. Toutes ces remarques m’ont incité à travailler sur la paix en plus du fait que je suis un militant des droits humains et ce thème apparaît également dans mes tableaux.
Je peins aussi l’Amour qui est un facteur incontournable dans le respect des droits humains. Le rêve intervient de temps à autre dans mes œuvres à travers la poésie que j’y glisse.
Ceci fait partie intégrante des Africains que nous sommes avec nos multiples rêves même s’ils ne se concrétisent jamais. Dans mes tableaux, je me focalise beaucoup plus sur la l’aboutissement du rêve.

Afreepress.info : Parlant de la paix, « Rêve de la paix » et
« Labyrinthe de la paix », constituent les titres de deux de vos tableaux. Le militant des droits humains que vous êtes influe-t-il sur votre art ?


Richard Laté Lawson-Body : L’idée de la paix et les thèmes des droits humains vont de pair, pour le simple fait qu’on ne saura parler des droits humains que lorsqu’il y a la paix. Depuis tout jeune, j’ai compris que tout ce qui se fait n’est pas forcément pour le bonheur de l’humain.
Suite à une exposition au siège de l’Organisation des Nations Unies pour la Paix et le Désarmement en Afrique (UNREC), j’ai été effusé par le discours d’un monsieur dont je tais le nom. Ce discours avait clairement relevé que les droits humains et la paix marchaient de pair. Mes recherches dans ce sens m’ont permis de découvrir pas mal de choses dans le sens de la promotion des droits humains. En tant qu’artiste, c’était de mon devoir que de porter haut ce flambeau.

Afreepress.info : Tout ceci voudrait dire que votre engagement vis-à-vis des droits humains provient de votre militantisme ?

Richard Laté Lawson-Body : Je dirai oui. C’est vrai que les expositions que nous faisons ne sont pas souvent accessibles aux citoyens lambda, qui ne se limitent qu’à la beauté des tableaux sans toutefois percer leur mystère.
La compréhension est réservée aux nantis et aux habitués de l’art. Ceci étant, quand nous travaillons sur un thème, la torture par exemple, toute personne qui regarde un tel tableau l’analyse chez lui et essaie de prendre des résolutions pour éviter ce phénomène. C’est comme cela que nous apportons notre pierre pour la construction d’un monde qui respecte les droits humains.

Afreepress.info : Nous constatons de la verdure ou mieux, des éléments de la nature dans vos tableaux. Quelle est la place qu’occupe ceux-ci dans votre vie d’artiste ? Et Dieu, vit-il dans ce regard lointain que vous jetez au-delà de la vie ?

Richard Laté Lawson-Body : La nature se place au-dessus de tout dans ma vie. En tant que calligraphe, quand je n’ai pas assez d’éléments illustratifs pour certains tableaux, c’est la nature qui occupe cette place. Je la peins à partir des couleurs qui expriment tous les thèmes possibles.
Quand l’inspiration est absente, c’est dans la nature que je la cherche. Parlant de Dieu, il est nécessaire de souligner que je suis un croyant, même si je n’appartiens à aucune église, je crois beaucoup en Dieu.
Il est également au centre de mes créations. Dans un de mes tableaux intitulé « le miroir de Dieu », j’ai expliqué ce que Dieu représente et je suis arrivé à un niveau où Dieu ne se voit qu’à travers l’homme et la femme.
Cette hypothèse traduit aussi le fait que les deux êtres sont condamnés à vivre ensemble pour une société équilibrée. C’est aussi une forme de mon engagement qui interdit le fait que la femme soit reléguée au second plan comme cela se passe d’habitude.

Afreepress.info : Votre africanité se traduit par un goût du panafricanisme qui se lit sur certaines de vos œuvres. Que pensez-vous que l’Africain devrait faire pour sortir de l’ornière ?

Richard Laté Lawson-Body : Cet aspect est l’apanage d’un questionnement auquel je me soumets la plupart du temps. En lisant les écrits d’Edem Kodjo, j’ai touché du doigt le panafricanisme.
C’est une union sacrée sans laquelle l’Afrique ne pourra pas sortir de l’ornière. Cette union doit se faire loin des armes à feu, comme l’a déjà prôné Nelson Mandela, Kwame N’krumah et autres leaders africains.

Afreepress.info : Avez-vous un mot à l’endroit du public togolais et celui mondial qui ne vous connaît pas assez ?

Richard Laté Lawson-Body : Aux Togolais, je les invite à s’intéresser un peu plus à l’art, à poser des questions au artistes qui ne sont qu’à leur disposition. Pour le reste du monde, je dis que le Togo existe mais ses artistes ne sont pas connus.
Donc, j’invite nos frères de la diaspora à venir voir ce que nous avons comme potentiel. Ainsi nous pourrons participer à des compétitions sur le plan mondial. Qu’ils s’approchent de l’art plastique togolais pour nous aider à l’amener loin.

Afreepress.info : Des perspectives d’avenir ?

Richard Laté Lawson-Body : Dans ma création, mes recherches m’ont amené à découvrir un thème que j’aimerais exposer dans les mois à venir. Le thème est basé sur les moisissures.
Dans la nature, elles constituent des êtres vivants qui sont très décoratifs même si elles ne font pas de mouvement. Donc ma prochaine exposition portera sur les moisissures.

Afrepress.info : Votre mot de fin.

Richard Laté Lawson-Body : Je tiens à remercier encore l’Agence Afreepress pour cette opportunité. Ce n’est pas tous les jours que les journalistes viennent dans nos ateliers, c’est donc une occasion que je saisis pour lancer un appel aux autres pour qu’ils vous emboîtent le pas.

Propos recueillis par MAO R.